CHAPITRE XXV.
arrivée de Sigismond et d’Adelheid au couvent précéda de
plus d’une heure celle des autres voyageurs. Ils furent reçus avec
l’hospitalité qui distinguait alors cette célèbre maison. Les visites
des curieux n’avaient pas encore lassé la bienveillance des moines
qui, plus habitués à recevoir des gens ignorants et appartenant
aux classes inférieures, se trouvaient toujours heureux de ranimer
la monotonie de leur solitude par la conversation des gens
d’esprit et bien nés. Le bon frère quêteur avait préparé leur
réception ; car, même sur le sommet du Saint-Bernard, il est toujours
avantageux de porter avec soi le prestige du rang et de la
considération dont on jouit au bas de la montagne. Quoique tous
les chrétiens reçussent un bon accueil, l’héritière des Willading,
nom qui était généralement connu et honoré entre les Alpes et
le Jura, reçut ces preuves d’empressement et de déférence qui
trahit les secrètes pensées en dépit des formes monacales, et qui
prouvèrent que les solitaires augustins n’étaient pas fâchés de
voir dans leurs sombres murailles un des plus beaux et des plus
nobles échantillons de l’espèce humaine.
Tout cela était perdu pour Sigismond ; il était trop occupé des événements de la matinée pour faire attention à autre chose, et, après avoir recommandé Adelheid et sa sœur aux soins de leurs femmes, il sortit pour attendre l’arrivée du reste de la société.
Comme nous l’avons déjà dit, le vénérable couvent du Saint-Bernard date d’une des époques les plus éloignées du christianisme. Il est construit sur le bord du précipice qui forme le dernier plateau pour monter au sommet. Le bâtiment est une espèce de barraque immense, haute et étroite, dont le toit est tourné du côté du Valais, et le fronton dans la direction de la gorge où il