s’avançant pour s’interposer entre la jeune fille et le juge. Vous savez, herr Bourrit, que nous avons d’autres prisonniers.
Le châtelain, qui sentait sa pénétration en défaut devant l’innocence et la sincérité de Christine, ne fut pas fâché de changer la direction de l’interrogatoire. On ordonna à la famille de Balthazar de se retirer, et on amena devait la cour Pippo et Conrad.
CHAPITRE XXVIII.
e bouffon et le pèlerin, quoique tous deux d’une tournure à
exciter la méfiance, se présentèrent avec l’assurance que donne
un cœur innocent. Leur interrogatoire fut court, car les détails
qu’ils donnèrent de leur voyage furent clairs et précis. Des circonstances
connues des moines aidèrent grandement à produire
la conviction qu’ils n’avaient point pris part à l’assassinat. Ils
avaient quitté la vallée quelques heures avant l’arrivée de Jacques
Colis, et ils atteignirent le couvent fatigués, les pieds écorchés,
comme tous ceux qui montent ce sentier pénible peu de temps
après le commencement de l’orage. Des mesures avaient été
prises par les autorités locales pendant les jours qui s’étaient
écoulés avant l’arrivée du bailli et du châtetain, afin de s’assurer
de tous les faits utiles pour connaître la vérité ; et le résultat de
ces informations fut favorable à ces gens dont les habitudes de
vagabondage avaient d’abord excité de justes soupçons.
Le babillard Pippo fut le principal orateur dans ce court interrogatoire, et il répondit avec une précision et une franchise qui lui rendirent un grand service ainsi qu’à son compagnon. Le bouffon, quoique accoutumé au mensonge et à la ruse, avait assez d’esprit naturel pour comprendre la position critique dans laquelle il était placé, et qu’il était plus sage d’être sincère que d’atteindre le même but par ses moyens ordinaires. Il répondit donc au juge avec une simplicité que l’on n’aurait pas attendue