Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 15, 1839.djvu/340

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glorieuse ! Ces jeunes gens sont vraiment dignes d’être Français, et le vieux capitaine aussi.

— Ne nous envoient-ils pas des nouvelles ? demanda Ève après un autre intervalle, plus long que le premier, qu’elle avait passé à rendre secrètement des actions de grâces au ciel.

— Non, pas encore. Ils se félicitent, je crois.

— Il est bien temps, dit Nanny, qu’ils envoient la colombe pour qu’elle cherche la branche d’olivier. La guerre est un trop grand péché pour qu’on doive la continuer longtemps.

— Je crois voir un bateau revenir de ce côté, dit M. Effingham qui avait continué à laisser la longue-vue à la gouvernante.

Oui, c’est celui de M. Blunt.

— Y distinguez-vous quelqu’un ? demanda le père ; car, se fût-il agi du monde entier, Ève n’aurait pas été en état de prononcer un seul mot.

— Je crois y voir M. Sharp. Oui, c’est bien lui.

— Est-il seul ?

— Non, ils sont deux. Mais oui, c’est M. Blunt, notre jeune héros !

Ève baissa la tête ; et pendant que sa reconnaissance s’élevait vers le ciel, le sang qui montait à ses joues trahissait les sentiments de son cœur.

M. Effingham reprit alors sa longue-vue des mains de l’enthousiaste Française, qui, dans son admiration pour la bravoure, avait surmonté ses craintes ; et il rendit compte à son tour de ce qui se passait près du paquebot, autant qu’on pouvait le voir de si loin. Quoiqu’ils sussent déjà une bonne partie des événements qui avaient eu lieu ; ce fut une demi-heure bien longue pour tous ceux qui se trouvaient dans la chaloupe que celle qui s’écoula jusqu’au moment où la chaloupe du bâtiment danois les accosta. Chacun était aux fenêtres pour les voir arriver ; et les deux jeunes gens furent reçus comme des libérateurs, à la sûreté desquels chacun prenait un vif intérêt.

— Mais mon cousin John ? dit Ève dont les traits expressifs annonçaient tour à tour la joie et la crainte, comme on voit en avril un rayon de soleil succéder à un nuage ; mon père n’a pu l’apercevoir parmi tous ceux qui sont sur le banc de sable.

Les deux jeunes, gens racontèrent alors le malheur arrivé à M. Lundi, et la manière dont John Effingham s’était chargé d’en prendre soin. Quelques minutes délicieuses se passèrent ; car rien n’est plus agréable que le premier moment de bonheur qui succède à une victoire. Les deux jeunes gens, aidés par le domestique de