Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 15, 1839.djvu/370

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mites, quelle étonnante variété d’apparence physiques, de civilisation, de lois, et même de couleur, ne trouvons-nous pas, et au milieu de tout cela des traits frappants de ressemblance !

— Autant, dit Paul, qu’une expérience restreinte m’a permis d’en juger, j’ai trouvé partout non-seulement la même nature, mais un sentiment commun de justice qui semble inné ; car, même au milieu des scènes de violence les plus affreuses ou des excès les plus déplorables, ce sentiment se fait jour à travers les traits les plus sauvages de l’individu. Le droit de propriété, par exemple, est reconnu partout ; le misérable qui dérobe tout ce qu’il peut montre lui-même qu’il a la conscience de son crime en le commettant clandestinement et comme un acte qu’il faut cacher. Tous les hommes paraissent avoir les mêmes notions générales de justice ; et si elles sont oubliées, c’est par suite du système politique, de tentations irrésistibles, de pressants besoins ou de luttes acharnées.

— Et pourtant, en règle générale, partout le plus fort opprime le plus faible.

— Il est vrai ; mais il montre qu’il sent qu’il a tort, directement ou indirectement. On peut montrer que l’on comprend la grandeur de son crime, même par sa manière de le défendre. Pour ce qui regarde nos ennemis récents, je ne puis dire que j’aie éprouvé aucun sentiment d’animosité, même au plus fort de la mêlée ; car, d’après leurs usages, leur conduite était légitime.

— On me dit, interrompit M. Effingham, que si plus de sang n’a pas été versé inutilement, c’est à votre présence d’esprit et à votre fermeté que nous en sommes redevables.

— C’est au moins une question, continua Paul en ne répondant à ce compliment que par une inclination de tête, si des peuples civilisés n’ont pas été conduits par des raisonnements faits sous l’influence de l’intérêt, à commettre des actes tout aussi opposés à la justice naturelle que rien de ce que peuvent faire ces Barbares. Peut-être aucune nation n’est-elle complètement à l’abri du reproche d’avoir adopté quelque mesure politique tout aussi peu justifiable en soi-même que le système de pillage en usage parmi les Arabes.

— Comptez-vous pour rien les droits de l’hospitalité ?

— Regardez la France, cette nation distinguée par sa civilisation avancée, du moins dans les hautes classes. Hier encore, les effets de l’étranger qui mourait sur son territoire appartenaient à un monarque qui nage dans le luxe. Rapprochez cette loi des traités qui invitaient les étrangers à venir dans ce pays  ; comparez les besoins