Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 16, 1839.djvu/99

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tuation s’étend depuis la côte jusqu’à l’extrême frontière de l’ouest ; car, quoiqu’il y ait un fond justifiable pour une bonne partie de cette prospérité imaginaire, la vérité est tellement mêlée avec le mensonge que les meilleurs observateurs peuvent seuls en faire la distinction ; et, suivant l’usage, c’est le mensonge qui domine.

— D’après ce que vous dites, Monsieur, la manie des tulipes en Hollande n’était rien, comparée à celle-ci.

— Elle était la même en principe, mais elle n’avait pas la même étendue. Si je pouvais vous faire entrer dans toutes les maisons et vous initier dans le secret de l’intérêt, de la cupidité, des folies qui règnent dans le cœur humain, vous, comme spectateur calme, vous seriez étonné de la manière dont l’espèce dont vous faites partie peut se laisser abuser. — Mais remettons-nous en marche, et peut-être en trouverons-nous encore quelque exemple.

— Monsieur Effingham ! — Je vous demande pardon, monsieur Effingham, dit un négociant fort bien mis, qui entrait dans la Bourse ; que pensez-vous à présent de notre querelle avec la France ?

— Je vous ai dit, monsieur Bale, tout ce que je puis vous dire à ce sujet. Quand j’étais en France, je vous ai écrit que l’intention du gouvernement français n’était pas d’exécuter le traité, et vous avez vu que le résultat a justifié mon opinion. Vous avez la déclaration du ministère français qu’à moins que le gouvernement américain ne fasse une apologie, l’argent ne sera pas payé ; et je vous ai dit que je pensais que la girouette qui est sur le clocher ne tournerait pas plus aisément que cette politique ne serait abandonnée s’il arrivait en Europe quelque chose qui le rendît nécessaire, ou si le ministère français pouvait croire qu’il est possible à ce pays de faire la guerre pour un principe. Telles sont mes opinions, comparez-les aux faits, et jugez vous-même.

— C’est la faute du général Jackson, Monsieur ; — c’est la faute de ce monstre : sans son message, nous aurions reçu l’argent depuis longtemps.

— Sans son message ou quelque autre mesure aussi décidée, monsieur Bale, vous ne le recevriez jamais.

— Ah ! mon cher Monsieur ! je sais que vos intentions sont bonnes ; mais je crains que vous ne soyez prévenu contre cet excellent homme, le roi des Français. Les préventions, monsieur Effingham, ne savent jamais rendre justice.

M. Bale secoua la tête, sourit, et disparut dans la foule, bien