Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 17, 1840.djvu/313

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— demanda Cap avec un air d’inquiétude. — Vous devez savoir que la capture d’un bâtiment sur les hautes mers est un acte de piraterie, à moins qu’on n’ait une commission régulière, comme croiseur de Sa Majesté, ou une lettre de marque comme corsaire.

— J’ai l’honneur d’avoir la nomination de mon colonel comme sergent-major du 55e, — répondit le sergent en se redressant de toute sa hauteur, — et cela doit suffire, même pour le roi de France. Dans le cas contraire, j’ai les ordres par écrit du major Duncan.

— Point de papiers comme croiseur du roi !

— Ceux dont je viens de parler doivent suffire, frère ; et je n’en ai pas d’autres. Il est d’une vaste importance pour l’intérêt de Sa Majesté dans cette partie du globe, que les barques dont je parle soient capturées et conduites à Oswego ; car leur cargaison se compose de couvertures, de mousquets, de munitions, en un mot de tous les objets à l’aide desquels les Français engagent les maudits sauvages, leurs alliés, à commettre les plus noirs forfaits, foulant aux pieds les préceptes de notre sainte religion, les lois de l’humanité, et tout ce que les hommes ont de plus cher et de plus sacré. En nous emparant de tous ces objets, nous dérangerons leurs plans et nous gagnerons du temps ; car ils ne pourront en envoyer d’autres dans ce pays avant la fin de l’automne.

— Mais, mon père, le roi d’Angleterre n’emploie-t-il pas aussi des Indiens ? — demanda Mabel avec curiosité.

— Oui, certainement, il en emploie, et il en a bien le droit, que Dieu le protège ! Cela fait une grande différences, comme chacun peut le comprendre, que ce soient les Anglais ou les Français qui emploient des sauvages.

— Cela est assez clair, frère Dunham ; mais je ne vois pas mon chemin aussi clairement dans l’affaire des papiers qui vous manquent.

— La nomination faite par un colonel anglais doit convaincre tout Français du droit que j’ai d’agir ainsi, et ce qui est encore plus, il faudra qu’il s’en contente.

— Mais que ce soient les Français ou les Anglais qui emploient des sauvages, mon père, je ne vois pas quelle en est la différence.

— Toute la différence possible, mon enfant. D’abord les Anglais sont naturellement humains et courageux, les Français féroces et timides.