Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 17, 1840.djvu/439

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Les uns s’en vont aussi stupides et aussi ignorants que si Dieu ne leur avait pas donné la raison et une existence dont il faut rendre compte tandis que d’autres nous quittent en se réjouissant comme des gens qui laissent derrière eux de lourds fardeaux. Je pense qu’alors l’esprit voit clair, mon ami, et que les actions passées se représentent en foule au souvenir.

— Je parierais qu’il en est ainsi, Pathfinder. J’ai aussi vu quelques scènes semblables, et j’espère qu’elles m’ont rendu meilleur. Je me rappelle qu’une fois où je crus mon heure arrivée, mon livre de loch fut feuilleté avec une promptitude dont jusqu’alors, je ne me serais pas jugé capable ; Je n’ai pas été un très-grand pécheur, — ami Pathfinder, — c’est-à-dire jamais sur une grande échelle. Cependant, j’ose le dire, si la vérité était connue, un amas considérable de petites choses pourraient m’être reprochées aussi bien qu’à tout autre ; mais je n’ai jamais commis de piraterie, de haute trahison, d’incendie, ni aucun acte semblable. Quant à la contrebande et autres choses de ce genre, je suis marin, et je pense que toutes les professions ont leur côté faible ; votre commerce lui-même n’est peut-être pas tout-à-fait sans tache, tout honorable et utile qu’il paraît.

— Beaucoup de guides et d’éclaireurs sont de francs coquins, et, comme le quartier-maître, sont payés par les deux côtés à la fois ; j’espère ne pas leur ressembler, quoique toute occupation conduise à la tentation. J’ai été terriblement mis à l’épreuve trois fois dans ma vie, et une fois j’ai fléchi un peu ; j’espère cependant qu’il ne s’agissait de rien qui puisse troubler un homme dans ses derniers moments. La première fois, je trouvai dans les bois un paquet de peaux que je savais appartenir un Français qui chassait de notre côté des frontières, où il n’avait nulle affaire ; c’étaient vingt-six peaux de castor les plus belles qui puissent réjouir un œil humain. La tentation était rude, car je pensais que la loi serait presque pour moi, quoique nous fussions en temps de paix mais ensuite, je me rappelai que ces lois n’avaient pas été faites pour nous autres chasseurs ; je réfléchis que le pauvre homme pouvait avoir fondé de grandes espérances pour l’hiver prochain sur la vente de ces peaux, et je les laissai à leur place. La plupart de nos gens dirent que j’avais eu tort, mais la manière dont je dormis cette nuit-là me donna la conviction que j’avais bien fait. La seconde épreuve eut lieu lorsque je trouvai le fusil qui est certainement le seul dans cette partie du monde