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LE LAC ONTARIO.

favorable, il partit alors, après avoir pris congé de Pathfinder de l’air d’un homme qui croit voir pour la dernière fois un être distingué avec lequel il a eu des relations passagères. Tous deux se séparèrent en paraissant s’estimer mutuellement, tandis que chacun d’eux sentait que l’autre était pour lui une énigme.


CHAPITRE XXIX.


« Elle se retourna joyeuse, afin qu’il pût voir le sourire qui errait sur ses lèvres. Mais lorsqu’elle observa la mélancolie de son front, ce sourire s’évanouit. »
Lalla Rook. Thomas Moore.

Les nombreux événements qui s’étaient écoulés depuis peu de jours avaient été d’une nature trop agitante, et avaient exigé trop de preuves de courage de notre héroïne, pour qu’elle restât dans l’accablement du désespoir. Elle pleurait son père, elle tressaillait souvent en se rappelant la mort subite de Jenny, et toutes les scènes horribles dont elle avait été témoin ; — mais aussi elle rappela à son aide toute son énergie naturelle, et ne resta pas plus long-temps dans l’abattement qui suit ordinairement une grande douleur. Peut-être l’accablement et, pour ainsi dire, la stupéfaction qui pesait sur la pauvre Rosée-de-Juin, et qui la tint pendant près de vingt-quatre heures dans un état de stupeur, aida Mabel à surmonter ses propres sensations, car elle s’était sentie appelée à consoler la jeune Indienne. Elle avait rempli ce devoir avec ce calme et cette douceur insinuante qui donne à son sexe tant d’influence dans de semblables occasions.

Le Scud devait partir dans la matinée du troisième jour. Jasper avait fait tous les préparatifs ; les différents effets étaient embarqués, et Mabel avait fait à Rosée-de-Juin de tendres et pénibles adieux. En un mot, tout était prêt et tout le monde avait quitté l’île, excepté la jeune Indienne, Pathfinder, Jasper et notre héroïne. La première était allée pleurer dans un buisson, et les autres s’approchaient d’un lieu où trois pirogues étaient amarrées :