Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 18, 1841.djvu/399

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nications ne profitaient pas seulement à Ozéma, car, en recevant les leçons de Luis, elle lui avait appris autant de mots de son propre langage qu’il lui en avait enseigné du sien. Ils s’entretenaient de cette manière, ayant recours tantôt à l’un, tantôt à l’autre des deux dialectes, suivant la nécessité du moment. Nous allons donner une traduction libre du dialogue qui s’établit entre eux dans cette circonstance, tout en essayant de lui conserver son caractère particulier.

— Pauvre Ozéma, répondit notre héros, l’attirant doucement dans une position où il pouvait la soutenir contre les mouvements violents de la caravelle, tu dois en effet regretter Haïti et la paisible sécurité de tes bosquets ?

— Caonabo là, Luis.

— Il est vrai, innocente fille. Mais Caonabo n’est pas plus terrible que ces éléments en fureur.

— Non, non, non Caonabo. — Bien méchant. Brisé le cœur d’Ozéma. — Non Caonabo. — Non Haïti.

— Ta crainte du chef caraïbe, chère Ozéma, a un peu dérangé ta raison. Tu as un Dieu aussi bien que nous autres chrétiens, et comme nous, tu dois mettre ta confiance en lui. Lui seul peut te protéger.

— Quoi protéger ?

— Avoir soin de toi, Ozéma, veiller à ce qu’on ne te fasse point de mal, pourvoir à ta sûreté et à ton bien-être.

— Luis protéger Ozéma. — Ainsi promettre à Mattinao. — Ainsi promettre à Ozéma. — Ainsi promettre son cœur.

— Chère fille, ainsi le ferai-je de toute l’étendue de mes moyens. Mais que puis-je contre cette tempête ?

— Quoi Luis faire contre Caonabo ? Le tuer, — couper les Indiens, — le faire fuir !

— Cela était facile à un chevalier chrétien, qui avait une bonne épée et un bouclier, mais ce serait impossible contre une tempête. Une seule espérance nous est laissée ; confions-nous au Dieu des Espagnols.

— Les Espagnols grands, — leur Dieu grand.

— Il n’y a qu’un seul Dieu, Ozéma. C’est lui qui gouverne tout, soit à Haïti, soit en Espagne. Tu te rappelles ce que je t’ai dit de son amour, de sa mort pour nous sauver, et tu m’as promis alors de l’adorer et d’être baptisée lorsque tu arriverais dans mon pays.