Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 18, 1841.djvu/53

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Castille, l’Aragon, Léon, Valence et plusieurs autres des plus belles provinces d’Espagne ; — la Navarre, petit royaume dans les Pyrénées ; — le Portugal, qui était à peu près ce qu’il est aujourd’hui, — et Grenade, dernière possession des Maures au nord du détroit de Gibraltar.

Ni Ferdinand ni la reine son épouse n’oublièrent l’article de leur contrat de mariage qui obligeait le premier à entreprendre une guerre pour détruire le pouvoir des Maures en Espagne. Cependant le cours des événements occasionna un délai de bien des années avant qu’ils pussent mettre à exécution un plan conçu depuis si longtemps ; mais quand le moment en fut enfin arrivé, cette providence, qui semblait disposée à conduire la pieuse Isabelle, par une suite d’incidents importants, de la condition où nous l’avons vue réduite à Valladolid, au sommet de la puissance humaine, n’abandonna pas sa favorite. Les succès suivirent les succès, — les victoires succédèrent aux victoires ; les Maures perdirent toutes leurs forteresses, toutes leurs villes, et se trouvèrent enfin assiégés dans leur capitale, seule place qui leur restât dans toute la Péninsule. La réduction de Grenade était, aux yeux des chrétiens, un événement qui ne le cédait en importance qu’à la conquête du Saint Sépulcre sur les infidèles, et elle fut distinguée par des traits singuliers qui ne se présentèrent probablement jamais dans le cours d’aucun siège. Cette ville se rendit le 25 novembre 1491, vingt-deux ans après le mariage d’Isabelle ; et l’on peut remarquer ici que la date de ce jour et de ce mois est devenue célèbre, trois siècles plus tard, dans les annales de l’Amérique, comme étant précisément l’époque à laquelle les Anglais évacuèrent à contre-cœur leur dernière possession sur les côtes des États-Unis.

Pendant le cours de l’été précédent, tandis que les forces espagnoles étaient campées devant Grenade, et qu’Isabelle et ses enfants suivaient de leurs propres yeux le cours des événements, il arriva un accident qui fut sur le point d’être fatal à la famille royale et aux progrès des armes des chrétiens. Le feu prit au pavillon de la reine, qui fut entièrement consumé, ce qui mit tout le camp dans un grand danger, car l’incendie se communiqua à beaucoup de tentes des nobles, et leur causa une perte considérable en joyaux et en vaisselle d’argent. Cependant le mal n’alla pas plus loin. Ferdinand et Isabelle, pour éviter le retour d’un accident semblable, et regardant probablement la conquête de