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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 19, 1842.djvu/229

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DEERSLAYER

je sais aussi bien lire que Judith. Cela pourrait vous sauver la vie que de pouvoir lire la Bible aux sauvages, et cela sauvera certainement votre âme, car ma mère me l’a dit bien des fois.

— Merci, Hetty ; oui, merci de tout mon cœur. Suivant toute apparence, nous aurons trop à faire pour avoir beaucoup de temps de reste ; mais une fois la paix arrivée, et lorsque je reviendrai vous voir sur ce lac, je m’en occuperai avec autant d’attention que si je devais y trouver à la fois plaisir et profit. — Peut-être, Judith, devrais-je être honteux de mon ignorance ; mais la vérité est la vérité. Pour ces Iroquois, il n’est pas fort probable qu’un ou deux versets de la Bible leur fassent oublier une bête à deux queues. J’aime à croire qu’ils rendront les prisonniers, se fiant à une diablerie ou à une autre pour les reprendre, et pour se rendre maîtres en même temps de nous, de tout ce qui se trouve dans le château, et de l’arche par-dessus le marché. Toutefois, il faut que nous ménagions ces vagabonds, d’abord pour tirer votre père et Hurry de leurs mains, et ensuite pour conserver la paix entre nous jusqu’à ce que le Serpent que voilà puisse trouver un moyen de délivrer sa fiancée. S’ils s’abandonnent à la colère et à la férocité, les Indiens se hâteront de renvoyer au camp leurs femmes et leurs enfants ; tandis qu’en les entretenant dans le calme et la confiance, nous réussirons peut-être à trouver Hist à l’endroit qu’elle a elle-même indiqué. Plutôt que de voir maintenant le marché entièrement rompu, j’ajouterais une demi-douzaine de ces figures d’hommes armés d’arcs et de flèches dont nous avons un bon nombre dans la caisse.

Judith y consentit volontiers, car elle aurait renoncé même à la robe de brocart à fleurs plutôt que de ne pas racheter la liberté de son père, et se conformer aux désirs de Deerslayer.

Il y avait alors tant d’espoir de succès, que tous les habitants du château reprirent courage, sans cesser cependant d’observer avec toute la vigilance convenable les mouvements de l’ennemi. Néanmoins, les heures succédèrent aux heures, et le soleil avait de nouveau commencé à descendre sur les sommets des collines de l’ouest, sans que rien semblât annoncer le retour du radeau. Malgré ce délai, il restait encore une chance d’espoir, que Deerslayer ne manqua pas de communiquer à ses compagnons inquiets. On devait sûrement supposer que les Indiens avaient laissé leurs prisonniers au camp plutôt que de croire qu’ils s’en fussent encombrés en les emmenant dans les bois, où ils n’allaient que pour une courte excursion. S’il en était ainsi, il fallait un temps considérable pour