Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 2, 1839.djvu/110

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’avait d’autre fils que l’officier blessé dont nous avons déjà parlé. Ce fut là que le major dépêcha un exprès, porteur de la malheureuse nouvelle de la situation du capitaine, et chargé d’une invitation, qui, comme il n’en doutait pas, amènerait bientôt la sœur affectueuse près du lit d’un frère blessé.

S’étant acquitté de ce devoir, quoique avec une sorte de répugnance qui ne pouvait que rendre ses inquiétudes encore plus vives, Dunwoodie se rendit sur le terrain où ses troupes avaient fait halte. On voyait déjà par-dessus la cime des arbres les restes des Anglais marcher sur les hauteurs, en bon ordre et avec précaution, pour gagner les barques. Le détachement de Lawton était sur leur flanc, les suivant à peu de distance, et attendant avec impatience un moment favorable pour les attaquer. Enfin on perdit de vue les deux partis.

À peu de distance des Sauterelles était un petit village traversé par plusieurs routes, et d’où par conséquent il était facile de marcher de tous côtés dans l’intérieur du pays. C’était une halte favorite pour la cavalerie, et il était souvent occupé par les détachements légers de l’armée américaine pendant leurs excursions. Dunwoodie avait été le premier à reconnaître les avantages de cette position, et comme il était obligé de rester dans cette contrée jusqu’à ce qu’il reçût de nouvelles instructions, on doit bien supposer qu’il ne négligea pas d’en profiter. Il commanda donc à son corps de se mettre en marche pour cet endroit, et y fit transporter les blessés. Déjà on s’était occupé du triste devoir de donner la sépulture aux morts. Tandis qu’il prenait ces arrangements, un nouveau sujet d’embarras se présenta à lui. En marchant de côté et d’autre, il aperçut le colonel Wellmere seul, rêvant tristement au revers qu’il avait éprouvé, auquel personne ne songeait, si ce n’est qu’il recevait une marque de civilité des officiers américains qui passaient près de lui. Ses inquiétudes pour Singleton avaient entièrement banni de son souvenir son prisonnier, et il s’approcha de lui en lui faisant des excuses de sa négligence. L’Anglais reçut ses politesses avec froideur, et se plaignit de souffrir des suites de ce qu’il lui plut d’appeler une chute accidentelle de cheval. Dunwoodie, qui avait vu un de ses dragons le renverser, et certainement avec peu de cérémonie, sourit légèrement et lui offrit les secours d’un chirurgien. Il ne pouvait les lui procurer qu’aux Sauterelles, et en conséquence ils s’y rendirent tous deux.