Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 2, 1839.djvu/52

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— Vous appelez cela des sornettes ! s’écria le capitaine avec gaieté. Encore à présent le général Montrose porte la santé de miss Peyton ; et il n’y a pas huit jours que j’en ai été témoin à la table de sir Henry.

— Vous ne valez pas mieux que votre sœur, Henry, répliqua la tante ; et pour couper court à toutes ces folies, il faut que je vous fasse voir mes étoffes fabriquées dans le pays : elles feront contraste avec toutes les belles choses que Birch vient de nous montrer.

Les jeunes gens se levèrent pour suivre leur tante, satisfaits l’un de l’autre, et en paix avec tout l’univers. En montant l’escalier qui conduisait à la chambre où étaient déposées les étoffes dont elle venait de parler, miss Peyton saisit pourtant une occasion pour demander à son neveu si le général Montrose souffrait encore autant de la goutte que lorsqu’elle l’avait connu.

C’est une découverte pénible que nous faisons en avançant dans la vie que nul de nous n’est exempt de faiblesses. Quand le cœur est neuf encore, et que l’avenir s’offre à nos yeux sans aucune de ces taches dont l’expérience viendra le souiller, tous nos sentiments ont un caractère de sainteté. Nous aimons à supposer à nos amis naturels toutes les qualités auxquelles nous aspirons nous-mêmes et toutes les vertus que nous avons appris à révérer. La confiance avec laquelle nous accordons notre estime semble faire partie de notre nature, et l’affection qui nous unit à tout ce qui nous tient par les liens du sang a une pureté qu’on peut rarement espérer de voir conserver tout son éclat pendant tout le cours de la vie. La famille de M. Wharton continua à jouir, pendant tout le reste de cette journée, d’un bonheur qu’elle n’avait pas connu depuis longtemps et qui naissait, du moins dans les plus jeunes de ses membres, des délices d’une affection pleine de confiance, et de la réciprocité des sentiments les plus désintéressés.

M. Harper ne reparut qu’à l’heure du dîner, et, dès que le repas fut terminé, il se retira dans sa chambre, sous prétexte de quelques affaires. Malgré la confiance qu’avaient inspirée ses manières, son absence fut un soulagement pour la famille ; car la visite du capitaine Wharton ne pouvait durer que quelques jours, tant parce que son congé était limité qu’à cause du danger qu’il courait d’être découvert.

Cependant le plaisir de se revoir l’emporta sur la crainte. Une ou deux fois pendant la journée, M. Wharton avait encore té-