Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 20, 1843.djvu/124

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subite a quelque chose d’effrayant, Monsieur ; car quel est l’homme qui n’a pas besoin de mettre ordre à ses affaires et à sa conscience ? Il est vrai que pour nous autres marins, la vie ne tient qu’à un fil, mais si nous mourons ; c’est pour notre roi et notre patrie, et l’on peut espérer la merci du ciel quand on meurt en s’acquittant de ses devoirs. Quant à moi, j’ai toujours eu un testament fait d’avance, ce qui règle toutes mes affaires en ce monde, tandis que j’espère humblement en notre tout-puissant Médiateur dans celui qui doit le suivre. J’espère que sir Wycherly a pris la même mesure de prudence ?

— Sans doute, mon cher oncle a pu désirer de laisser quelques bagatelles à des amis intimes par forme de souvenir, dit Tom d’un air embarrassé, et je crois qu’il a fait son testament. D’ailleurs, vous penserez sans doute comme moi qu’il ne serait pas en état à présent d’en faire un, s’il n’y avait pas encore songé.

— Peut-être pas exactement en ce moment ; mais il peut survenir dans sa maladie un intervalle lucide qui lui en fournirait l’occasion. Je crois que M. Dutton m’a dit, quand nous étions à table, que le domaine est substitué ?

— Oui, sir Gervais, et c’est moi, quoique indigne, qui suis appelé à recueillir cette substitution ; ce que je ne regarde pas comme un gain, suivant les idées communes du monde, puisque ce n’est qu’en perdant mon oncle que je puis en hériter.

— Votre père était, je crois, l’aîné des frères du baronnet, dit le vice-amiral, un nuage de méfiance passant sur son esprit, quoiqu’il n’eût pu dire d’où il venait ni vers quel point il se dirigeait. — M. le baron Wychecombe était votre père ?

— Oui, sir Gervais, et j’ai toujours trouvé en lui un père tendre et indulgent. Il m’a laissé toutes ses épargnes, environ sept cents livres de revenu annuel. Il est donc clair que la mort de sir Wycherly est un événement qui ne m’est pas plus nécessaire que désirable.

— Comme de raison, vous hériterez du titre comme du domaine ? dit sir Gervais, porté par les expressions surérogatoires du jeune homme, plutôt que par la curiosité, à lui faire des questions, qu’il aurait jugées peu convenables en toute autre occasion.

— Comme de raison, Monsieur. Mon père était le seul frère qui restât à sir Wycherly, le seul qui se soit jamais marié, et je suis son fils aîné. Le triste événement qui vient d’arriver fait qu’il est heureux que j’aie pu me procurer tout récemment ce certificat de son mariage avec ma mère. — N’est-il pas vrai, Monsieur ?

À ces mots, Tom tira de sa poche et montra au vice-amiral un