Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 20, 1843.djvu/22

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La nature fut sur le point de triompher sur le cœur du père, mais ses idées inflexibles de justice, peut-être aussi quelques doutes qu’il avait, et la connaissance acquise du véritable caractère de Tom, finirent par l’emporter.

— Cela ne doit pas être, sir Wycherly, répondit-il, — Tom n’a aucun droit au domaine de Wychecombe et sir Reginald y a le meilleur droit moral possible, quoique la loi lui soit contraire. Si Michel avait fait la substitution au lieu de notre bisaïeul, sir Reginald serait également appelé à la recueillir.

— Je n’ai jamais aimé ce sir Reginald, dit le baronnet avec un ton de dépit.

— Qu’importe ? il ne vous importunera ni pendant votre vie ni après votre mort. — Eh bien ! je vous préparerai un testament, et j’y laisserai en blanc le nom du légataire. C’est le dernier acte de ma profession que je ferai jamais, et c’est l’acte le plus convenable quand on a la mort sous les yeux.

Ainsi se termina cette conversation. Le testament fut préparé dans toutes les formes légales ; sir Wycherly l’emporta dans sa chambre pour le lire, en remplit tous les blancs du nom de Thomas Wychecombe, le signa et y mit son cachet en présence de son frère, et le remit ensuite à son neveu, pour qu’il le conservât, lui enjoignant positivement de garder un profond secret sur cette affaire jusque après sa mort. Le baron Wychecombe mourut au bout de six semaines, et le baronnet retourna chez lui, regrettant sincèrement le seul frère qui lui restât. Il n’aurait pu faire un choix plus malheureux d’un héritier ; car Tom Wychecombe était en réalité fils d’un procureur du Temple, et non celui du juge et sa prétendue ressemblance avec ce dernier n’existait que dans l’imagination de sir Wycherly.



CHAPITRE II.


Comme il est effrayant et étourdissant de jeter les yeux si bas ! Les corbeaux et les corneilles qui volent sous nos pieds ne paraissent que des scarabées. À mi-chemin entre le sommet du rocher et la terre, un homme est suspendu, recueillant de la perce-pierre. — Quel métier dangereux !
ShakspeareLe roi Lear.



Cette digression sur la famille Wychecombe nous a fait oublier la station des signaux, le promontoire et le brouillard, dont nous avons parlé en commençant cette histoire. La petite maison construite sur