Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 20, 1843.djvu/302

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

chasse du vent sont précisément en ligne dans la direction de la frégate, et le mauvais temps ne peut l’empêcher de se servir de ses deux canons les plus élevés au-dessus de l’eau.

— Je ne crois pas, Greenly. Peut-être fera-t-il feu de sa batterie du gaillard d’avant, mais il n’essaiera pas de se servir de rien qui soit en dessous.

Sir Gervais avait en partie raison et en partie tort. Le français essaya de faire feu de sa batterie basse, mais dès la première fois que le vaisseau plongea, une lame frappa son bossoir du vent, et fit entrer par le sabord une colonne d’eau qui jeta la moitié de l’équipage de la pièce sous le vent. Au milieu de ce déluge, le coup partit, le boulet y ayant été placé l’instant d’auparavant, ce qui donna à cette scène un air étrange de chaos. On ne recommença pas cette épreuve, quoiqu’on eût mieux réussi sur le gaillard d’avant. On tira plusieurs coups successivement, mais toujours, sans succès, ce qui provenait d’une cause à laquelle les canonniers de la marine font rarement assez d’attention ; le boulet s’étant constamment écarté d’environ deux à trois cents pieds de la ligne visuelle, attendu la force du vent, qui soufflait en sens contraire, lorsqu’il avait parcouru le mille qui séparait les deux bâtiments. Sir Gervais surveillait avec inquiétude l’effet du feu des ennemis ; mais voyant tous les boulets tomber en deçà de la frégate, il se rassura et commença à donner toute son attention à d’autres objets plus importants.

Comme nous approchons du moment où il est nécessaire que le lecteur puisse se faire une idée exacte de la position relative des deux flottes nous terminerons ici ce chapitre, et nous réserverons cette explication pour le commencement du suivant.



CHAPITRE XXII.


Tous étaient joyeux, tous riaient et poussaient des acclamations, en voyant le navire s’élancer sur l’Océan, fendre les flots couverts d’écume et la faire rejaillir sur le pont ; comme un coursier vigoureux qui, sans s’arrêter dans sa course, lance de côté l’écume qui lui sort de la bouche.
Percival



Le long crépuscule d’une haute latitude était terminé, et le soleil, quoique caché sous des nuages, était levé. Le grand jour contribuait à diminuer l’aspect sombre de l’Océan, quoique le courroux des vents et des vagues lui donnât encore un air menaçant. Du côté du vent,