Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 25, 1846.djvu/372

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sur ce point, soit que ses pensées l’y portassent naturellement, soit qu’il devinât la sollicitude de son amie.

— Je ne saurais rester longtemps avec vous maintenant, Mary, dit-il ; et je voudrais que M. Worden unît ses prières aux vôtres en ma faveur. Corny ira bien le prier de venir me voir.

Je disparus aussitôt, et je ne fus pas dix minutes absent ; il ne fallut pas plus de temps à M. Worden pour se préparer, et nous nous rendîmes ensemble à la chambre du malade. Le ministre aimait Guert, et il accomplit cette triste cérémonie avec une ferveur qui la rendit encore plus touchante ; elle parut faire beaucoup d’impression sur Guert, qui n’avait jamais réfléchi beaucoup à ces graves questions qui se rattachent à notre existence, à notre origine, à notre avenir ; et la manière dont il écouta les prières récitées pour lui était de nature à nous remplir de consolation.

Avec quelle tendre vigilance Mary lui continua ses soins pendant cette triste journée ! Elle semblait ne plus connaître la fatigue. Vers le soir, elle vint à nous d’un air presque joyeux, et nous dit tout bas que Guert semblait mieux. Dix minutes ne s’étaient pas écoulées, que, m’approchant du lit, je remarquai qu’il faisait un léger mouvement de la main comme s’il désirait me parler.

— Corny, me dit-il d’une voix éteinte, c’est presque fini ; je voudrais voir Mary Wallace encore une fois avant de mourir !

Mary était derrière moi ; elle tomba à genoux, et serra son ami dans ses bras. Rien ne fut dit de part ni d’autre ; ou, si quelques paroles furent échangées, ce fut une sainte communication qui ne fut entendue que du ciel. Cette jeune femme si timide, si réservée, resta une heure entière dans cette attitude, et ce fut dans ce long et tendre embrassement que Guert rendit le dernier soupir.

Pauvre ami ! sans doute il avait ses imperfections ; mais les longues années qui se sont écoulées depuis sa mort n’ont nullement affaibli dans mon cœur l’estime que méritait un si noble caractère.