Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/202

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dans un collège. Je ne vois pas trop à quoi importe qu’on ait appris de telle ou telle manière, pourvu qu’on sache ; mais c’est égal. Quel est votre avis à l’égard de la possession ? devient-elle définitive au bout de vingt et un ans, qu’il y ait un écrit ou non ?

— Non, sans doute. La loi est formelle ; il faut un titre quelconque, ou la possession ne compte pour rien.

— J’ai entendu soutenir le contraire, et il y a de très-bonnes raisons à donner pour que la possession compte au contraire pour tout. Mais, entendons-nous bien ; par possession, je n’entends pas suspendre à un arbre une sacoche, comme on le fait quelquefois, mais s’établir honnêtement et loyalement sur la terre, abattre les arbres, construire des moulins, des granges, des maisons, faire des semences, des récoltes ; enfin agir comme j’agis toujours ; voilà ce que j’appelle prendre possession ; et voilà ce qui devrait être respectable aux yeux de la loi comme de l’Évangile. Car je ne suis pas de ceux qui reculent devant la religion.

— En cela, vous avez parfaitement raison. Ayez toujours l’Évangile de votre côté dans toutes vos actions, voisin Mille-Acres. Nos ancêtres puritains n’ont pas traversé l’Océan, affronté les horreurs du désert, souffert tout ce qu’il est possible de se figurer, et tout cela pour rien.

— Les horreurs du désert ! ce n’est pas ce qui me ferait les plaindre beaucoup ; mais traverser l’océan, c’est autre chose. Voilà ce qui doit mettre curieusement la patience à l’épreuve. Je n’ai jamais pu me faire à l’eau. On dit qu’il n’y a pas un seul arbre qui croisse entre l’Amérique et l’Angleterre. On peut bien rencontrer par-ci par-là, quelques planches flottantes, mais pas une seule créature d’arbre depuis la baie de Massachussetts jusqu’à la ville de Londres.

— C’est tout eau, et, par conséquent, les arbres sont rares, Mille-Acres ; mais venons à notre affaire. Je vous disais donc que l’ourson est dehors, et qu’il montrera les dents tout aussi bien que le vieil ours lui-même, s’il vient à savoir tous les trains de bois qui sont sur l’eau, sans parler des planches qui sont empilées ici.

— Qu’il les montre ! s’écria le vieux squatter en jetant un re-