Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 26, 1846.djvu/41

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— Jolie ? dites ravissante, adorable, et whig par-dessus le marché !

— Je savais bien qu’elle vous plairait ! s’écria Catherine triomphante. Je verrai mon vœu le plus cher accompli !

— Votre vœu le plus cher, ma sœur ? j’aime à le croire ; mais ce ne sera pas par le mariage d’un Littlepage avec une Bayard.

Catherine rit de cette saillie pour cacher son embarras ; bientôt nous nous retrouvâmes tous ensemble ; et, par un de ces revirements assez communs dans les promenades entre jeunes gens des deux sexes, le hasard plaça Tom auprès de Catherine, et me rapprocha de Priscilla. Je ne sais ce que les deux premiers purent se dire, quoiqu’il soit assez facile de le deviner ; mais ma jolie Whig revint sur le sujet de la révolution.

— Vous avez dû être un peu surpris, major, me dit-elle, de n’entendre me prononcer aussi chaudement en faveur du nouveau gouvernement, lorsque plusieurs branches de ma famille ont été si rudement traitées par lui ?

— Vous voulez parler des confiscations ? Je ne les ai jamais approuvées, et je voudrais qu’elles n’eussent pas eu lieu ; car elles pèsent surtout sur ceux qui ont été le plus inoffensifs, tandis que la plupart de nos ennemis les plus actifs y échappent. Cependant ce n’est, après tout, que le résultat inévitable des guerres civiles, et ce qui nous serait arrivé à nous-mêmes, si nous avions en le dessous.

— C’est ce que j’ai entendu dire ; mais comme aucun de mes proches parents n’a été atteint, mon patriotisme se trouve à l’aise, et n’est point aux prises avec les affections privées. Vous avez pu remarquer que mon frère n’est pas aussi bon Américain que sa sœur ?

— Je ne puis lui savoir mauvais gré de rester fidèle au parti vaincu.

— Il est du moins très-sincère dans son opinion, et j’espère que cela lui fera trouver grâce auprès de vous. Des intérêts trop chers y sont engagés pour que je ne le désire pas vivement ; et, puisque je suis la seule whig de la famille, il m’a semblé que c’était à moi de prendre la défense d’un frère tendrement chéri.