Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 27, 1847.djvu/248

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lumière, et n’étant éclairé que par la lune qui était sur le point de se coucher. J’étais là depuis une demi-heure au plus, songeant aux événements de la journée, lorsque je crus apercevoir un objet en mouvement sur un sentier qui conduisait au village, mais qui était tout à fait séparé de la grande route. Ce sentier était fort isolé et s’étendait pendant un mille à travers mes terres, borné de chaque côté par un treillage élevé, et serpentant ensuite au milieu des taillis et des bosquets de la pelouse. Il avait été tracé afin de permettre à mon grand-père de parcourir à cheval ses champs, sans être arrêté par les barrières ; en pénétrant dans le petit bois déjà décrit, il le traversait par un petit coude qui nous conduisait au village en abrégeant considérablement la distance. Ce sentier servait souvent à ceux qui venaient à Ravensnest ou qui en sortaient à cheval, mais rarement à d’autres qu’aux personnes appartenant à la famille.

Je pouvais voir toute la ligne de ce sentier, à l’exception de quelques intervalles cachés par les arbres et les taillis. Je ne me trompais pas. À cette heure tardive, quelqu’un s’avançait en galopant dans le sentier, tantôt complétement à découvert, tantôt caché par les treillages. Le sentier conduisait à la pelouse à travers un joli ravin boisé ; le cavalier mystérieux s’y précipita, et je portai aussitôt mes yeux vers l’endroit où il devait reparaître en sortant du couvert.

En deçà du ravin, le sentier restait dans l’ombre pendant environ cinquante pas, après quoi il serpentait sur la pelouse en pleine lumière de la lune. À l’endroit où finissait l’ombre, un chêne antique s’élevait solitaire, et sous ses vastes branches était un siège souvent fréquenté par les dames dans les chaleurs de l’été. Mes regards se promenaient de ce point où commençait la lumière à celui où le sentier sortait du ravin. Vers ce dernier endroit, je pus distinguer un objet en mouvement, et bientôt je vis plus clairement la personne que je surveillais. Le cheval était toujours au galop, et conserva cette allure jusque auprès du chêne. Là, à ma profonde surprise, je vis une femme s’élancer de la selle avec une grande vivacité et attacher son cheval à l’ombre-de l’arbre. Après quoi elle marcha rapidement vers la maison. Craignant de déranger le repos de la famille, je sortis de ma chambre et descendis sans lumière, la lune pénétrant à travers les passages de manière à diriger mes pas. Mais quelque prompts qu’eussent été mes mou-