Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 28, 1850.djvu/220

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expérimentés. C’est cependant un danger assez ordinaire au milieu des glaces, et dont il faut tenir compte.

Quand les montagnes se détachent de l’endroit où elles se sont d’abord formées, ce qui arrive au moment des gelées ou bien pendant les mois d’été, elles se terminent ordinairement en plateaux mais elles perdent bientôt cette forme régulière par l’action des vagues et de la glace, quelques-unes étant formées de neige gelée, quelques-unes de l’humidité que les brouillards jettent dans l’atmosphère, et quelques-unes seulement d’eau pure à l’état de glace. Les premières fondent le plus tôt, et une montagne qui dérive quelque temps, en exposant un de ses côtes à l’action du soleil, perd bientôt son équilibre et s’incline vers l’horizon. Le centre de gravité finit par se déplacer et le bas de la montagne par se montrer à la surface des eaux, tandis que cette masse énorme semble à moitié couchée sur l’Océan qui l’entraîne. Ces accidents sont nombreux et variés au milieu des glaces. Celui qui venait d’alarmer et d’étonner nos marins était du genre suivant : une masse de glace, qui avait environ un quart de mille de longueur et autant de largeur, flottant à cent pieds au-dessus de la surface des eaux, et du double de cette épaisseur au-dessous des ondes, avait été la cause de tout cet ébranlement. Elle avait très-bien conservé ses formes ; et elle était restée droite jusqu’au dernier moment, quoiqu’en raison des nombreuses couches de glaces formées par la neige, sa base eût fondu beaucoup plus d’un côté que de l’autre. Quand le moment précis arriva où la montagne commença à perdre ainsi son équilibre, cette masse énorme tourna avec une certaine lenteur, mais en produisant le même effet qui aurait pu résulter de la chute d’une montagne de glace, espèce d’accident dont on a vu beaucoup d’exemples, et même des exemples remarquables.

L’explication de Stimson, qui enlevait à cet accident tout caractère mystérieux, n’était guère de nature à calmer les craintes qu’on pouvait éprouver. Si une montagne avait pu opérer cette évolution, il y avait lieu de croire que d’autres pourraient en faire autant. Dagget et Gardiner pensaient tous deux que la chute d’une montagne de la même grandeur à la longueur d’un câble