Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 28, 1850.djvu/67

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Roswell vit que les espérances du vieillard étaient trop ardentes, pour qu’il fût facile de les contrarier, et que toute son avarice était en jeu. Toutes ses passions se trouvaient ainsi absorbées par une seule. Il ne s’agissait plus pour lui d’occuper une position politique, bien qu’autrefois il eût beaucoup désiré, de représenter Suffolk à Albany ; il songeait même bien moins au meeting et à ses honneurs, tandis qu’il ne regardait les autres hommes et ses parents eux-mêmes que comme des rivaux ou des instruments de son avarice.

— Il est facile de donner à un mensonge l’apparence de la vérité, pour peu qu’on ait l’habitude de cette manœuvre. Ce Dagget a-t-il dit le total de la somme qu’il prétendait avoir été laissée par les pirates sur ce parage ?

— Oui, reprit le diacre, et toute cette âme étroite et avare sembla étinceler dans ses yeux pendant qu’il faisait cette réponse. D’après le récit du pirate, il ne pouvait y avoir dans ce trésor moins de trente mille dollars, et presque tous en bons doublons frappés au coin des rois, doublons qui pèsent bien seize onces à la livre.

— La cargaison du Lion de Mer, si elle est bien choisie, vaudra le double, pourvu que l’on trouve les animaux auxquels il faudra donner la chasse.

— C’est possible, mais pensez, Gar’ner, il s’agit ici d’or monnayé, d’or tout brillant, tout étincelant !

— Mais quel droit avons-nous à cet or, en admettant même qu’il soit là et que nous le trouvions ?

— Quel droit ! s’écria le diacre avec beaucoup de surprise. Ce que la divine providence donne à l’homme ne lui appartient-il pas ?

— En vertu de la même règle, on pourrait dire que la divine Providence avait donné cet or aux pirates. Il doit y avoir de légitimes possesseurs de cet argent ; si l’on pouvait les découvrir ?

— Oui, si l’on pouvait les découvrir. Écoutez, Gar’ner, avez-vous dépensé dernièrement un shilling ou un quart de shilling ?

— Un bon nombre de l’un et de l’autre, répondit le jeune homme avec un sourire qui montrait combien il avait le cœur léger. Je voudrais être aussi économe que vous, et je deviendrais