Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 28, 1850.djvu/79

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comment vous le caractérisez, du moment qu’il n’est plus qu’un homme. La différence entré Dieu et l’homme est trop immense pour que rien puisse l’affaiblir.

— Mais si je trouve impossible de croire tout ce que vous croyez, Marie, vous ne me punirez sans doute pas de la franchise que je mets à vous dire la vérité, toute la vérité.

— Non, certainement, Roswell, répondit avec douceur, presque avec tendresse, l’aimable fille ; rien ne m’a donné une meilleure opinion de vos sentiments, Roswell, que la noblesse avec laquelle vous avez admis la justice de mes soupçons sur votre manque de foi, car il n’y a de vrai que la foi. Cette droiture de votre cœur m’a fait vous honorer et vous estimer, sans parler de l’attachement d’enfance que, je ne veux point vous le cacher, j’ai depuis si longtemps ressenti pour vous.

— Ô Marie, s’écria Roswell, prêt à tomber à genoux devant la jolie enthousiaste, qui était assise à ses côtés, et dont la physionomie, pleine de sympathie pour Roswell, rayonnait de la lumière de deux beaux yeux bleus, les plus doux qu’une jeune fille ait jamais baissés devant un jeune homme sous l’impression d’un modeste amour, ô Marie comment, vous si bonne en tout, pouvez-vous être si cruelle sur un seul point ?

— Parce que ce seul point est tout pour moi, Roswell, répondit la jeune fille, et en même temps ses traits s’animèrent. Il faut que je vous réponde comme Josué parlant autrefois aux Israélites : Aujourd’hui, choisissez qui vous voulez servir que ce soient le Dieu que vos pères ont servi, ou les dieux des Ammonites, sur la terre desquels vous vivez ; mais quant à moi et à ma maison, nous servirons le Seigneur.

— Me classez-vous parmi les idolâtres et les païens de la Palestine ? dit Gardiner d’un ton de reproche.

— Vous l’avez dit, Roswell. Ce n’est pas moi qui vous ai classé ainsi, c’est vous qui vous êtes classé vous-même. Vous adorez votre raison, au lieu du seul et vrai Dieu vivant ! C’est là une idolâtrie de la plus mauvaise espèce, puisque l’adorateur ne voit jamais son idole, et qu’il n’en connaît pas l’existence.

— Vous regardez donc comme une idolâtrie de se servir des