Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/151

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À trois lieues du Cratère, le canal se divisait en deux branches, dont l’une suivait la direction du nord, tandis que l’autre se prolongeait à perte de vue vers le sud-est. Le rocher qui formait le point de jonction fut nommé la Fourche de la Pointe, et Marc suivit le second embranchement, où il avait le vent favorable. La Brigitte continua sa route en portant au plus près. Un peu plus loin, d’autres canaux se présentèrent ; Marc choisit celui qui se dirigeait vers le nord-est. L’eau était profonde, et à l’entrée la passe pouvait avoir un demi-mille de large ; mais elle se terminait tout à coup par un bassin ovale d’un mille de large dans son plus grand diamètre, et borné à l’est par une ceinture de rochers qui s’élevaient d’une vingtaine de pieds au-dessus de l’eau. Le fond de ce bassin était un beau sable clair, et la sonde donnait vingt brasses. C’était un port naturel, et la main des hommes aurait eu peine à en construire un plus sûr et plus commode.

Marc avait été près d’une demi-heure à courir des bordées dans le « Havre Ovale » avant de remarquer que la surface unie de ses eaux semblait un peu troublée par une légère ondulation qui semblait venir de l’extrémité nord-est. Il gouverna aussitôt sur ce point, et découvrit que les rochers s’ouvraient pour laisser un passage d’environ cent verges de largeur. Le vent le permettant, Marc s’y engagea aussitôt, et il se sentit bientôt porté sur les vagues longues et houleuses de la pleine mer. Il tressaillit d’abord au mugissement de la lame qui plongeait dans les cavernes des rochers ; il tremblait que son frêle esquif ne fût lancé contre cette côte âpre et dure où un seul choc l’eût mis en pièces. Mais trop bon marin pour perdre la tête, il tint bon et vit qu’en virant à temps il pouvait parer les rochers qui lui restaient sous le vent. Après avoir couru deux ou trois courtes bordées, il se trouva à un demi-mille au vent d’une longue muraille rocailleuse de vingt à vingt-cinq pieds de hauteur. Il mit en panne pour sonder, et lâcha quarante brasses de ligne sans atteindre le fond mais partout, sous le vent, il ne voyait que des bancs et des rochers, tandis qu’au vent, ainsi que devant et derrière lui, c’était l’Océan. Il était arrivé à la limite est des