Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/222

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quatre heures après avoir appareillé, la Neshamony était sous le vent du Cap Sud et entrait dans le canal qui longeait les domaines du gouverneur. Marc ne pouvait se lasser d’admirer les changements qui s’opéraient de jour en jour sur ces rochers sortis si récemment du sein de l’Océan. La prairie avait pris un nouvel aspect ; les travaux de défrichement avaient été menés grand train par les porcs dont la reproduction avait pris des proportions vraiment formidables. Le sol avait été si bien remué, les herbes marines et le limon si bien mêlés ensemble, que tout cela ne semblait plus former qu’une seule couche de terre végétale. Les plantations de Socrate ne prospéraient pas moins. Il avait eu l’idée de défaire quelques grands paniers qu’Heaton avait apportés du Groupe de Betto, et avec les branches de saule vert qui les formaient, il avait fait des boutures qu’il avait plantées en terre. Presque toutes avaient repris, et déjà plusieurs avaient la hauteur d’un homme. En quelques années elles promettaient de devenir des arbres, sinon très-utiles, du moins du plus bel aspect. Marc ne tarda pas à apercevoir des cocotiers qu’il avait plantés lui-même il y avait près de trois ans, et déjà ils s’élevaient à près de trente pieds de hauteur. C’était un arbre qu’on ne pouvait reproduire avec trop de soin, tant il offrait de ressources précieuses : un fruit sain et délicieux ; une coque facile à polir et qu’on pouvait creuser en coupes aussi gracieuses qu’utiles ; des filaments à tresser en cordages ; des feuilles propres à faire des nattes, des paniers, des hamacs, mille objets utiles, tandis que le tronc pouvait servir à tous les usages des bois de construction : canots, gouttières, etc. Il y avait encore un autre emploi qu’on pouvait faire de cet arbre, et qu’Heaton avait appris au gouverneur. Pendant que Brigitte gardait encore la chambre, à la suite de ses couches, Marc ne savait qu’imaginer pour varier ses repas ; et un jour il lui servit un plat de légumes verts que l’accouchée trouva délicieux, assurant qu’elle n’avait jamais mangé rien de plus délicat. C’étaient les feuilles les plus nouvelles et les plus tendres du cocotier qui avaient formé ce mets succulent, mais très-dispendieux ; car