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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/349

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vait pas prévue, et à laquelle il n’était pas préparé à répondre.

— Avant d’aller plus loin, j’aimerais à savoir quels sont ceux qui m’interrogent, répondit M. Woolston. Quels sont les bâtiments qui viennent mouiller dans nos eaux, et sous quel pavillon naviguent-ils ?

— Un vaisseau de guerre ne reconnaît qu’à un vaisseau de guerre le droit de le questionner, reprit l’interprète en souriant.

— Prétendez-vous donc être des bâtiments de guerre ?

— Vous le verrez, si vous nous contraignez à employer la force. Du reste, nous ne sommes pas venus ici pour répondre à des questions, mais pour en faire. Votre colonie appartient-elle à quelque nation particulière, oui ou non ?

— Nous sommes tous des États-Unis d’Amérique, dit le gouverneur avec hauteur, et c’est son pavillon qui flotte sur notre bord.

— Des États-Unis d’Amérique ! répéta l’interprète avec une expression de mépris mal déguisée. Il y a de bonnes prises à faire parmi les bâtiments de cette nation, comme le savent bien les grandes nations belligérantes de l’Europe ; et puisque tant d’autres en profitent, je ne vois pas pourquoi nous n’aurions pas aussi notre part.

Que nos lecteurs n’oublient pas que ce dialogue avait lieu il y a plus de quarante ans, et qu’alors la république, loin d’envoyer ses flottes et ses armées conquérir d’autres États, avait bien assez de peine à défendre les siens. On dit que le dernier empereur d’Autriche, le bon et simple François II, un jour qu’on lui montrait les ruines du petit château de Habsbourg, qui couronne encore une petite éminence dans le canton d’Aarau, en Suisse, fit cette observation : Je vois maintenant que nous n’avons pas toujours été une grande famille.

Je ne sais pas quel serait aujourd’hui l’avis du gouverneur Woolston, mais cette épigramme lancée contre son pays natal fut loin de lui plaire. Cependant, il dissimula son mécontentement, et se contenta de demander froidement ce qu’on avait à lui proposer ?