Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/373

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la première fois ; et il lui annonça qu’il venait d’envoyer quelques matelots en haut pour chercher la terre. D’après ses calculs, ils devaient être au plus à vingt lieues du Pic, et il s’étonnait qu’on ne le vît pas encore. Au surplus, cela ne pouvait tarder, car il était tout à fait sûr de sa latitude, et quant à la longitude, il ne croyait pas qu’il pût s’être trompé de beaucoup. Les matelots en vigie furent hélés alors pour savoir s’ils découvraient le Pic à l’avant ; la réponse fut qu’aucune terre n’était en vue sur aucun point de l’Océan.

Le bâtiment continua pendant plusieurs heures à courir vent arrière, et ce même vide extraordinaire régnait au-dessus des eaux. Enfin une île fut aperçue, et la nouvelle en fut envoyée sur le pont. Le Rancocus gouverna vers cette île et dès qu’on en fut près, à la surprise entière de tout l’équipage, on vit qu’elle était entièrement inconnue. Marc et le capitaine avaient la conviction qu’ils ne pouvaient être qu’à quelques lieues du Pic et du volcan et ils ne voyaient ni Pic ni volcan ; à la place était une île nouvelle. Cette terre ignorée, de peu d’étendue, sortait de l’eau de trois cents pieds environ. On mit un canot à la mer pour aller considérer de plus près cet étrange phénomène.

Marc, en approchant, découvrit quelques contours qui lui semblaient familiers. L’embarcation se porta un peu plus vers le nord, et il aperçut un arbre solitaire. À cette vue, un cri s’échappa de ses lèvres, et la terrible vérité lui fut révélée tout à coup dans toute son horreur. Il voyait la cime du Pic, et cet arbre était celui qu’il avait désigné lui-même pour servir de signal. Le reste de son paradis s’était abîmé sous les eaux.

On mit pied à terre et un examen plus attentif confirma entièrement cette effrayante catastrophe. De tout ce séjour enchanteur que Marc avait appelé le Pic de Vulcain, il ne restait debout que le sommet rocailleux couvert d’une couche vénérable de guano. Tout le reste avait été submergé, et lorsqu’on interrogea la sonde, la plaine, ce lieu de délices, qui semblait tenir du ciel plus que de la terre, se trouva être à près de cent brasses au fond de l’Océan.