Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 29, 1852.djvu/43

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

révolution ordinaire, et les premières lueurs qui éclairèrent l’horizon oriental leur permirent de commencer leurs observations. Pour les faire d’une manière plus complète, ils montèrent, Marc sur le mât de misaine, et Bob sur le grand mât de hune, examinant les différents points du récif, et dévorant du regard tout ce qu’il était possible de découvrir. La distance qui les séparait était si peu considérable qu’ils pouvaient facilement causer ensemble, ce qu’ils continuèrent de faire. Dans une pareille situation, on a tant de pensées à échanger !

Nos marins n’eurent rien de plus pressé que de regarder du côté sous le vent, et comme c’était l’ouest, c’était naturellement le point le plus obscur encore de l’horizon. Ils espéraient y découvrir, sinon un groupe d’îles, au moins une île isolée ; mais aucune terre ne paraissait. Il est certain que le jour était si faible encore qu’une erreur était possible. C’était à cet espoir qu’il fallait s’accrocher pour le moment. Marc demanda à Bob ce qu’il en pensait.

— Attendons quelques minutes, Monsieur, dit son compagnon ; laissons se soulever encore un coin du rideau. Il y a, comme qui dirait à une lieue d’ici, à bâbord, un je ne sais quoi sur l’eau que je ne sais trop à quelle sauce mettre. Mais ce qui me crève les yeux, par exemple, ce sont les brisants. En voilà-t-il de tous les côtés ! L’un finit à peine que l’autre recommence. Je ne conçois vraiment pas comment nous avons pu nous faufiler à travers tout cela.

C’était la vérité. Du côté du vent, l’Océan commençait à s’éclairer à une distance considérable. C’était cette heure solennelle du matin où les objets se montrent distincts les uns après les autres, avant même de recevoir les premiers rayons du soleil, et où l’on dirait que la nature sort rajeunie et plus belle encore des mains du Créateur. La mer était tombée, et si les brisants paraissaient moins redoutables en apparence, il était impossible de se tromper sur leur position. Dans l’état actuel de l’Océan, il était évident que, partout où l’eau bouillonnait, il devait se trouver en dessous des rocs ou des écueils. La plupart