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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/116

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lui tenait au cœur, et il y répondit d’une manière digne de l’importance qu’il y attachait.

— Vous parlez en homme sensé et en sujet loyal, monsieur Dillon. L’habeas corpus, miss Alix, fut obtenu sous le règne du roi Jean, par ses barons, ainsi que la grande charte, pour la sécurité du trône. Le sang de quelques-uns d’entre eux coule encore dans mes veines, ce qui suffirait seul pour prouver qu’on n’oublia pas de consulter convenablement la dignité de la couronne. Quant aux pirates nos concitoyens, Christophe, il y a tout lieu de croire que la vengeance d’une Providence offensée les a déjà atteints. Ceux qui connaissent bien la côte me disent qu’il serait impossible à aucun bâtiment de se tirer du milieu des rochers où on les a vus, par une nuit aussi sombre, avec un vent si contraire ; et dans le fait, quand le jour est arrivé, on ne les a plus revus : il leur aurait fallu un pilote tel qu’un ennemi ne pourrait s’en procurer.

— Mais quels qu’ils soient, amis ou ennemis, Monsieur, continua Dillon, il y a tout lieu de croire que nous tenons en ce moment dans l’abbaye des gens qui peuvent nous en donner des nouvelles certaines, car les trois hommes que nous venons d’arrêter, non seulement paraissent fraîchement débarqués, mais ont le costume et l’air de marins.

— De marins ! répéta Catherine ; et une pâleur mortelle remplaça le vermillon que l’indignation avait appelé sur son visage.

— De marins, miss Plowden, dit encore Dillon en appuyant sur ce mot avec une satisfaction malicieuse qu’il cherchait à cacher sous un air de soumission respectueuse.

— Je vous remercie, Monsieur, de vous être servi d’un terme si honnête, répondit Catherine retrouvant au même instant sa présence d’esprit. L’imagination de M. Dillon est si disposée à peindre les choses en mal, qu’il a droit à nos remerciements pour ne pas avoir ajouté à notre frayeur en nous représentant ces hommes comme des pirates.

— Il peut encore se faire qu’ils méritent ce nom, miss Plowden, répliqua Dillon avec froideur ; mais mon éducation m’a appris qu’il faut entendre l’instruction d’une affaire avant de prononcer une sentence.

— Il a trouvé cela dans Coke sur Littleton, s’écria le colonel. La loi est un correctif salutaire pour les infirmités humaines, miss