Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/256

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sentiment de honte qui le porta à baisser la tête pour l’appuyer sur ses mains, ce qui le mit entièrement à l’abri derrière le corps du colonel. Toutes ces circonstances donnèrent le temps au contre-maître de réfléchir sur l’imprudence qu’il commettrait en alarmant toute la maison par le bruit d’un coup de pistolet.

— Mais vous ne m’avez rien dit de vos dames, ajouta Dillon après une pause de quelques instants. J’espère qu’elles ont supporté l’alarme occasionnée par les événements de cette journée d’une manière digne du nom d’Howard.

Le colonel jeta un coup d’œil autour de lui, comme pour s’assurer qu’ils étaient seuls, et répondit en baissant la voix :

— Elles ont mis de l’eau dans leur vin, Kit, depuis que ce rebelle Griffith a été amené à l’abbaye. Miss Howard a même daigné nous faire compagnie à dîner, et il y a en des mon cher oncle par-ci, et des prenez garde par-là. J’ai été supplié de ne pas m’exposer dans quelques escarmouches contre les révoltés qui ont osé faire une descente dans nos environs ; comme si un vieux soldat qui a servi pendant toute la guerre de 1756 à 1763 craignait l’odeur de la poudre plus que celle du tabac ! Mais toutes leurs cajoleries ne me séduiront pas. Il faut que ce Griffith aille à la Tour, monsieur Dillon.

— Mon avis serait de le livrer sans délai à l’autorité civile.

— Il sera livré au grand constable de la Tour ; au brave et loyal comte Cornwallis, qui fait maintenant la guerre aux rebelles dans ma propre province. Ce sera ce que j’appelle une justice de représailles. Mais, continua le vétéran en se levant avec un air de dignité, je ne veux pas qu’il soit dit que même le grand constable de la Tour de Londres puisse surpasser le vieux colonel Howard en hospitalité et en générosité envers ses prisonniers. J’ai donné ordre qu’on leur servît des rafraîchissements, et je vais voir si mes intentions ont été convenablement exécutées. Il faut aussi préparer un logement pour le lieutenant Barnstable, qui ne tardera probablement pas à être amené ici.

— Dans une heure au plus tard, dit Christophe en regardant à sa montre avec un air d’inquiétude.

— Il faut nous hâter, Kit, dit le colonel en s’avançant vers une autre porte qui conduisait aux appartements des prisonniers ; mais en songeant aux égards dus à ces malheureux qui ont violé toutes les lois, il ne faut pas oublier ce que nous devons aux