Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 3, 1839.djvu/86

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bord se promenaient à grands pas sur le tillac avec un air empressé, tout occupés de la gloire qu’ils allaient acquérir sous les ordres de leur capitaine, tandis que le petit nombre de marins désignés pour accompagner leur lieutenant marchaient gravement, les mains placées dans leur veste bleue, et les levant de temps en temps vers le ciel pour montrer à leurs compagnons moins expérimentés les indices qui annonçaient un changement favorable dans le temps.

Le dernier traîneur des soldats, son havresac sur le dos, venait de rejoindre ses compagnons déjà sous les armes, quand le capitaine Munson monta sur le pont accompagné du pilote et de son premier lieutenant. Celui-ci dit un mot à voix basse à un midshipman, qui courut lestement à l’autre bout du vaisseau, et presque au même instant on entendit la voix rauque d’un contre-maître s’écrier :

— Allons, les tigres ! allons, à bord !

Un roulement de tambour se fit entendre, et les soldats de marine s’alignèrent à leur rang, tandis que les six matelots composant l’équipage du cutter qui portait ce nom formidable, lançaient à la mer ce petit bâtiment. Cette opération se fit avec tout l’ordre, le sang-froid et l’adresse des meilleurs marins, et les soldats furent rapidement transportés de la frégate sur le schooner ; quoique le cutter parût de temps en temps chercher les cavités de l’Océan en s’enfonçant entre deux vagues, et vouloir ensuite s’élever jusqu’au ciel en reparaissant sur leur sommet.

Enfin, on avertit que le cutter était de retour et attendait les officiers. Le pilote se retira à l’écart pendant quelques instants pour causer avec le commandant, qui écoutait toutes ses paroles avec une attention singulière. Après quelques minutes de conversation, le vétéran se découvrit la tête et offrit la main au pilote d’une manière qui tenait en même temps de la cordialité d’un marin et du respect d’un inférieur. Le pilote répondit à sa politesse avec une sorte de nonchalance, et, tournant sur les talons, il s’avança vers ceux qui l’attendaient pour partir.

Lorsque M. Merry, qui avait reçu ordre d’accompagner le premier lieutenant, vit que ses officiers supérieurs étaient prêts à partir, il sauta sur le bord de la frégate, et se laissa glisser dans le cutter avec l’agilité d’un écureuil. Le capitaine Manuel s’arrêta en jetant un coup d’œil expressif sur le pilote, qui, d’après l’ordre