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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 30, 1854.djvu/124

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les Romains par leur accent italien en chantant des opéras italiens, répondit Jack en souriant. Ainsi, il n’y a pas de limites, ma chère mistress Gott, à la perfection provinciale dans toutes les parties du monde.

— Je crois vous comprendre, mais je ne suis nullement blessée du sens de vos paroles. Nous ne sommes pas très-susceptibles dans les abords des prisons. Il est, néanmoins, une chose que j’affirmerai : la harpe de Marie Monson est la première, je crois, qu’on ait entendue à Biberry. Gott m’a dit (c’était le nom familier dont se servait la bonne femme en parlant du haut sheriff de Dukes, comme les journaux affectaient d’appeler ce fonctionnaire) qu’il rencontra une fois quelques jeunes Allemandes courant le comté, jouant et chantant pour de l’argent, et qu’elles avaient un instrument absolument comme celui-ci, mais pas à moitié aussi élégant ; j’ai conçu de là le soupçon que Marie Monson pourrait bien être une de ces musiciennes voyageuses.

— Eh quoi ? pour courir la campagne, jouer et chanter dans les rues de village ?

— Non, pas cela ; je vois assez qu’elle ne peut être une femme de cette espèce. Mais il y a toutes sortes de musiciens, comme il y a toutes sortes de médecins et d’avocats, monsieur Wilmington. Pourquoi Marie Monson ne serait-elle pas une de ces étrangères qui s’enrichissent tout en chantant et en jouant ? Elle a autant d’argent qu’il lui en faut, et le dépense largement. Je vois cela à la manière dont elle en fait usage. Pour mon compte, je voudrais qu’elle eut moins de musique et moins d’argent pour le moment, car les deux ne lui font pas grand bien à Biberry.

— Pourquoi pas ? Est-il un être humain qui puisse trouver du mal à de la mélodie et à un esprit généreux ?

— Les gens trouvent du mal à tout, monsieur Wilmington, quand ils n’ont rien de mieux à faire. Vous savez comme moi-même ce qui en est de nos villageois. La plupart, croient Marie Monson coupable, et il y a peu d’exceptions. Ceux qui la croient coupable disent que c’est insolent à elle de s’occuper à chanter et à jouer dans la prison où elle est enfermée, et pour cette raison ils parlent contre elle.