Aller au contenu

Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 30, 1854.djvu/136

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à un garçon pour cacher ses bizarreries. C’est là que Dunscomb concentrait ses acquisitions superflues, y compris les charrues dont il ne faisait jamais usage, et toute espèce d’instruments de fermage condamnés au même désœuvrement, et tous les objets nécessaires à l’art de la pêche et de la chasse, dont il se passait la fantaisie, bien que l’avocat ne tînt jamais une ligne et ne se servît jamais d’un fusil. Mais Tom Dunscomb, quoiqu’il professât du dédain pour l’amour, avait des fantaisies à sa façon. Il éprouvait un certain plaisir de paraître avoir ces différents goûts, et il dépensait beaucoup d’argent pour Rattletrap dans l’achat de ces ornements caractéristiques. Un jour que Jack Wilmeter s’était hasardé à demander à son oncle quel plaisir il pouvait trouver à rassembler tant d’articles coûteux et inutiles, qui n’avaient pas le moindre rapport apparent avec ses recherches habituelles et sa profession, il obtint la réponse suivante :

— Vous avez tort, Jack, de supposer que ces objets soient inutiles. Un avocat a besoin d’une foule de connaissances qu’il ne trouvera jamais dans ses livres. On doit avoir dans l’esprit les éléments de toutes les sciences et de la plupart des arts, pour faire un parfait avocat ; car leur application deviendra nécessaire dans mille occasions, où Blackstone et Kent ne sont d’aucune utilité. Non, non ; je prise hautement ma profession, et je considère Rattletrap comme mon école de droit.

Jack Wilmeter était revenu de Biberry pour assister à la noce, et avait accompagné la réunion à la campagne, comme on l’appelait, quoique l’habitation de Dunscomb fût si près de la ville qu’il n’était pas difficile quand le vent soufflait du sud d’entendre le couvre-feu du Palais. La rencontre entre John Wilmeter et Anne Updyke fut heureusement rendue moins pénible par les circonstances particulières dans lesquelles se trouvait la dernière. Le sentiment qu’elle trahissait, la pâleur de ses joues, l’agitation de son maintien pouvaient assez naturellement être imputées à l’émotion d’une jeune fille, qui voit sa mère debout à l’autel à côté d’un homme qui n’est pas son père. Les jeunes gens se rencontrèrent pour la première fois à l’église, ou l’on n’avait occasion d’échanger ni paroles ni regards. Immédiate-