dire quelque chose de piquant sur l’état du neveu se trouvant dans la même catégorie que l’oncle ; mais ses sentiments étaient trop profondément intéressés pour lui permettre même de penser ce qui lui eût semble une profanation. Après une pausé d’un moment, elle reprit tranquillement :
— Je crois que vous m’avez donné à entendre que M. Timms n’est pas tout à fait aussi désintéressé ?
— Non certes. Miss Monson lui a donné des honoraires, qui, de son propre aveu, montent à mille dollars ; et le drôle a eu le front de prendre l’argent. Je lui ai représenté qu’il dépouillait de la manière la plus inconvenante une femme sans amis ; mais il me rit à la face. Timms a de bons côtés, mais l’honnêteté n’en fait pas partie. Il prétend qu’une femme n’est pas sans amis quand elle a une jolie figure et la poche bien garnie.
— Vous pouvez difficilement appeler sans amis une femme qui a tant d’argent à sa disposition, reprit Anna avec timidité, mais non sans un intérêt évident à la chose. Mille dollars me font l’effet d’une grosse somme.
— C’est beaucoup d’argent pour des honoraires ; quoiqu’on en donne quelquefois davantage. J’imagine que miss Monson en eût volontiers donné autant à l’oncle Tom, s’il avait voulu l’accepter. Timms me dit qu’elle avait l’intention de lui en offrir autant, mais il, l’engagea à attendre que le jugement fût rendu.
— Et d’où vient cet argent, John ?
— Ma foi, je n’en sais rien. Je ne suis nullement dans la confidence de miss Monson au sujet de ses affaires pécuniaires, du moins. Elle me fait parfois l’honneur, il est vrai, de me consulter sur le prochain jugement ; mais avec moi elle ne fait jamais mention d’argent, si ce n’est pour me prier de changer de gros billets de banque. Je ne vois rien de bien étonnant qu’une dame ait de l’argent. Vous qui êtes une sorte d’héritière vous-même, vous devez le savoir.
— Je n’ai pas d’argent par milliers de dollars, je vous assure, Jack ; ni ne compte en avoir. Je crois que mon revenu ne dépasserait pas de beaucoup les dépenses de cette femme.