directe de ses rayons. Deux ombres étaient assises, tandis qu’une troisième arpentait d’un pas lent et tranquille le plancher de pierre que recouvrait un tapis. Les premières étaient les formes fuyantes d’Anna Updyke et de Marie Moulin ; la dernière était celle de Marie Monson. Pendant une demi-heure la prisonnière était restée à genoux, demandant de la force pour supporter un fardeau plus lourd qu’elle ne s’y attendait ; et comme il arrive à ceux qui s’adressent au ciel pour en obtenir du secours, surtout si ce sont des femmes, elle recueillait le fruit de sa prière. Cependant elle n’avait pas proféré une syllabe, depuis qu’elle avait quitté la cellule. Sa voix douce, mélodieuse et distinguée se fit entendre pour la première fois :
— Ma situation est des plus extraordinaires, Anna, dit-elle ; elle est presque au-dessus de mes forces. Ce jour-ci a été terrible, toute calme que j’aie pu paraître ; et je crains que celui de demain ne soit encore plus dur à supporter. Il y a dans les yeux de ce Williams une expression qui m’alarme et me révolte à la fois. Je dois m’attendre à trouver en lui un implacable ennemi.
— Pourquoi, alors, ne pas vous soustraire à des scènes pour lesquelles vous êtes si peu faite, et ne pas abandonner à lui-même cet impudent Williams et ses projets de butin ?
— Cela ne pourrait me convenir. Plusieurs raisons importantes me font une loi de rester. Si je profitais des clés que j’ai en ma possession et que je quittasse la prison pour n’y plus revenir, la bonne mistress Gott et son mari seraient probablement pendus tous deux. Bien qu’ils ignorent ce que l’argent et l’adresse ont fait pour moi, il serait, difficile de faire croire au monde qu’ils sont innocents ; mais une raison plus élevée encore m’engage à demeurer : c’est que je veux réhabiliter ma réputation.
— Personne ne songera à vous confondre avec Marie Monson et en vous rendant à l’étranger, comme c’est, dites-vous, votre intention, vous échapperiez même au soupçon.
— Vous connaissez peu le monde, ma chère. Je vois que toutes les utiles leçons que je vous ai données comme un tendre Mentor, sont déjà oubliées. Les six années de différence entre votre âge et le mien m’ont donné une expérience qui me détend d’agir de