Aller au contenu

Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 30, 1854.djvu/318

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Un peu trop bien, j’en ai peur. Celle qui concerne votre mariage avec un Français, et votre séparation d’avec lui, s’est propagée dans toutes les villes inférieures du comté, de Dukes comme un vaste incendie. Elle est même venue aux oreilles de l’esquire Dunscomb, et se trouvera demain dans les journaux d’York.

Un petit tressaillement trahit la surprise de la prisonnière ; il fut accompagné d’un regard qui sembla marquer le déplaisir de ce qu’un conte mis en circulation par elle-même, selon les apparences actuelles, se fût étendu si au loin.

— Monsieur Dunscomb ! répéta-t-elle d’un air rêveur, l’oncle Tom d’Anna Updyke ; c’est un homme à qui une pareille histoire peut donner beaucoup à penser. Je voudrais qu’elle ne lui fût pas parvenue, à lui, moins qu’à personne, monsieur Timms.

— Si je puis juger de ses opinions par des actes et des expressions insignifiantes qui lui ont échappé, je suis porté à croire qu’en somme il ajoute foi à l’histoire.

Marie Monson sourit ; et, conformément à son habitude quand elle réfléchissait sérieusement, ses lèvres s’agitèrent ; quelques mots qu’elle murmura à voix basse purent être entendus d’une personne aussi près d’elle que l’était son compagnon.

— Il est temps maintenant, monsieur Timms, de mettre l’autre histoire en circulation, dit-elle avec vivacité. Qu’un rapport suive l’autre ; cela divisera les croyances du peuple. Il nous faut ici déployer de l’activité.

— Il y a moins de nécessité à nous remuer dans cette affaire, vu que Williams s’en est emparé d’une manière ou d’une autre, et que ses agents la répandront partout, longtemps avant que la cause vienne devant le jury.

— C’est heureux ! s’écria la prisonnière, applaudissant avec délice de ses jolies mains gantées. Une histoire aussi terrible que celle-là doit produire une réaction puissante, quand on viendra à en démontrer la fausseté. Je regarde ce conte comme la plus savante de nos manœuvres, monsieur Timms.

— Mais oui, c’est vrai ; je crois, miss Marie, qu’elle peut passer pour la plus hardie.