— C’était là une décision quelque peu libérale quant au droit du contre-interrogatoire, et l’accusée s’en servit aussi largement qu’il lui avait été accordé. Quant au témoin, il était évident qu’elle avait peu de goût pour l’examen minutieux qu’elle prévoyait devoir subir ; sa contenance, son attitude, ses manières, tout trahissait la répugnance qu’elle avait pour toute la procédure.
— Mistress Burton, dit Marie Monson, je désire que vous disiez à la Cour et au jury quand vous avez vu pour la première fois la pièce d’or entaillée ?
— Quand je l’ai vue pour la première fois ? Je la vis pour la première fois, quand la tante Dorothée me la montra pour la première fois, répondit le témoin.
Bien des personnes auraient été mécontentes de cette réponse, et auraient probablement répété la question sous une autre forme ; mais Marie Monson parut satisfaite, et continua son interrogatoire, absolument comme si elle avait obtenu des réponses en harmonie avec ses vues.
— L’avez-vous bien examinée ?
— Aussi bien que je le désirais. Rien ne m’empêchait de le faire.
— L’avez-vous reconnue immédiatement en la voyant dans ma bourse ?
— Assurément, dès que je vis l’entaille.
— Mistress Goodwin vous fit-elle remarquer l’entaille, ou la lui fîtes-vous remarquer ?
— Ce fut elle qui me la fit remarquer ; elle craignait que l’entaille ne diminuât la valeur de la pièce.
— J’ai entendu tout cela précédemment ; mais je vous le demande maintenant, au nom de l’Être dont l’œil est partout, n’avez-vous pas mis vous-même cette pièce d’or dans ma bourse quand elle passa de main en main, après en avoir enlevé celle où il n’y avait pas d’entaille ? Répondez-moi, par le salut de votre âme !
Une semblable question était tout à fait hors des règles, et s’éloignait de l’interrogatoire habituel des témoins, puisqu’une réponse affirmative incriminait sur-le-champ celui qui la ferait,