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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 30, 1854.djvu/393

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ciable ! — une excellente mère l’a instruite de tous les devoirs en harmonie avec son sexe. Je dois être franc avec vous, Mildred, vous n’avez pas eu cet avantage. Privée de votre mère dès le berceau, renommée pour votre fortune, et transplantée sur un sol étranger, votre éducation a été confiée à des mains mercenaires, à des flatteurs, à des gens indifférents, qui n’ont cherché qu’à vous instruire de ce qui frappe les yeux et provoque l’admiration. Sous ce rapport, leur succès a été complet.

— Tandis que, selon vous, ils ont moins bien réussi dans les points essentiels ? dit la jeune dame avec hauteur.

Permettez-moi d’être sincère. Vous le devez à nos rapports, à votre grand’mère, au passé, au présent. Je connais le sang qui coule dans vos veines, Mildred ; vous êtes volontaire par votre race, riche par héritage, indépendante par la folie de nos législateurs. Le hasard vous a ramenée dans votre patrie au moment où de nouvelles lois faisaient bon marché des intérêts les plus sacrés ; et ne consultant que votre penchant naturel, vous vous êtes hasardée à vous séparer de votre mari, à vous cacher dans un cottage, mesure, j’imagine, assez en harmonie avec votre amour du romantique.

— Nullement, Monsieur j’étais mal à l’aise, ennuyée, malheureuse chez moi, et j’ai cherché un refuge dans ce cottage. M. de Larocheforte a une passion pour le tabac, il prise nuit et jour.

— Alors suivirent les graves conséquences qui vous ont enveloppée dans de si terribles dangers.

— C’est vrai ; interrompit Mildred, mettant avec vivacité sa jolie main gantée sur le bras de Dunscomb, c’est très-vrai, mon cher monsieur ; mais avec quelle adresse j’ai su échapper à tout ! comme j’ai fait aller toutes ces marionnettes, votre monsieur Timms, la bonne mistress Gott, le shériff tout bouffi de sa dignité, cet abject Williams aussi, dont la main a senti tout le poids de mon or. Oh ! l’émotion de ces deux derniers mois, a été pour moi le paradis, et, pour la première fois depuis mon mariage, j’ai connu le vrai bonheur !

Dunscomb se tourna vers sa compagne d’un air étonné et la regarda en face. Jamais sa physionomie ne lui avait paru plus