Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/154

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Seth, attendu que personne ne peut prédire ce qui doit arriver.

— Entendez-vous le malin réprouvé ? s’écria, Mac-Fuse ; il n’a pas même la bonne foi de convenir de ses péchés comme un homme honnête. Mais je lui épargnerai cet embarras. Il est bon que vous sachiez, major Lincoln, qu’étant las d’avoir reçu, depuis le matin jusqu’au soir, les coups de fusil de cette canaille qui couvrait toutes les hauteurs, sans leur rendre leurs politesses, je saisis une occasion qui se présenta pour tourner un parti de ces démons incivilisés. Ce gaillard que vous voyez me lâcha trois coups de fusil avant que nous eussions pu les joindre, et alors l’arme blanche fit justice de ses camarades ; mais celui-ci m’ayant paru avoir une figure patibulaire, je l’ai amené ici dans l’intention de le faire pendre au premier moment favorable.

— Si ces faits sont exacts, dit le major, je crois que nous devons le livrer entre les mains des autorités compétentes ; car il reste encore à savoir quel parti on prendra à l’égard des prisonniers qu’on a faits dans cette affaire singulière.

— Je n’y penserais seulement pas, répondit Mac-Fuse, si ce réprouvé ne m’avait pas traité comme une bête sauvage en tirant sur moi à chevrotines, et s’il ne m’avait pas ajusté chaque fois comme si j’eusse été un chien enragé. Misérable ! osez-vous vous donner le nom d’homme, vous qui ajustez un de vos semblables comme si c’était une brute ?

— Ma foi ! dit Seth d’un air sombre, quand on est décidé à se battre, je crois que le mieux est d’ajuster, afin d’épargner les munitions.

— Vous reconnaissez donc que vous êtes accusé avec raison ? lui demanda Lionel.

— Comme le major est un homme modéré, et qui entendra la raison, répondit Seth, je lui parlerai raisonnablement. Je vous dirai d’abord que j’avais une petite affaire ce matin à Concorde…

— À Concorde ? s’écria Lionel.

— Oui, à Concorde, répondit Seth avec l’air de la plus grande innocence, une place à vingt ou vingt-un milles d’ici.

— Au diable vos milles et votre Concorde s’écria Polwarth ; y a-t-il un homme dans l’armée qui puisse oublier cette place si mal nommée ? Continuez votre défense, et ne nous parlez pas de la distance ; je l’ai mesurée pouce par pouce[1].

  1. Concord est situé à une vingtaine de milles de Boston.