CHAPITRE XVI.
ans le cours de cette matinée féconde en événements, les
Américains avaient fait mine de répondre au feu de leurs ennemis
en leur envoyant quelques volées de leurs petites pièces de
campagne, comme pour se moquer de la canonnade terrible qu’ils
essuyaient[1]. Mais lorsque le moment décisif approcha, ce même
silence morne et imposant qui régnait dans les rues désertes de
Charlestown se répandit autour de la redoute. À la gauche, sur les
prairies, les corps d’Américains récemment arrivés réunirent à
la hâte deux rangs de palissades en un seul, et recouvrant le tout
de l’herbe nouvellement coupée qui se trouvait dans les champs,
ils se postèrent derrière ce fragile rempart, dont le seul avantage
était de cacher leur petit nombre à l’ennemi. C’était là que
s’étaient rangés les hommes accourus des provinces voisines de
New-Hampshire et du Connecticut, et, appuyés sur leurs armes,
ils attendaient immobiles qu’on vînt les attaquer. Leur ligne
s’étendait depuis le bord de l’eau jusqu’au pied de la colline, où
elle se terminait, quelques centaines de pieds derrière les fortifications
élevées par leurs compatriotes, laissant une large
ouverture dans une direction oblique, entre les palissades et un
parapet en terre qui, partant de l’angle nord-est de la redoute,
descendait à peu près jusqu’au milieu de la côte.
À cinquante toises derrière ces ouvrages de défense s’élevait le sommet de Bunker-Hill, qui n’avait point été fortifié ; et les détroits de Charles et du Mystick, qui en baignaient la base, passaient si près l’un de l’autre, que le bruit de leurs eaux se
- ↑ Les Américains ne firent pas usage d’artillerie dans cette journée, par suite d’une erreur dans le placement des munitions.