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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 5, 1839.djvu/34

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le sourcil, Heyward, et par complaisance pour mon oreille curieuse, permettez qu’il voyage avec nous. D’ailleurs, ajouta-t-elle en baissant la voix et en jetant un regard sur Cora qui marchait à pas lents sur les traces de leur guide sombre et silencieux, ce sera un ami ajouté à notre force en cas d’événement.

— Croyez-vous, Alice, que je conduirais tout ce que j’aime par un chemin où je supposerais qu’il pourrait exister le moindre danger à craindre ?

— Ce n’est pas à quoi je songe en ce moment, Heyward ; mais cet étranger m’amuse, et puisqu’il a de la musique dans l’âme, ne soyons pas assez malhonnêtes pour refuser sa compagnie.

Elle lui adressa un regard persuasif, et étendit sa houssine en avant. Leurs yeux se rencontrèrent un instant ; le jeune officier retarda son départ pour le prolonger, et Alice ayant baissé les siens, il céda à la douce influence de l’enchanteresse, fit sentir l’éperon à son coursier, et fut bientôt à côté de Cora.

— Je suis charmée de vous avoir rencontré, l’ami, dit Alice à l’étranger en lui faisant signe de la suivre, et en remettant son cheval à l’amble. Des parents, peut-être trop indulgents, m’ont persuadé que je ne suis pas tout à fait indigne de figurer dans un duo, et nous pouvons égayer la route en nous livrant à notre goût favori. Ignorante comme je le suis, je trouverais un grand avantage à recevoir les avis d’un maître expérimenté.

— C’est un rafraîchissement pour l’esprit comme pour le corps de se livrer à la psalmodie en temps convenable, répliqua le maître de chant, en la suivant sans se faire prier, et rien ne soulagerait autant qu’une occupation si consolante. Mais il faut indispensablement quatre parties pour produire une mélodie parfaite. Vous avez tout ce qui annonce un dessus aussi doux que riche ; grâce à la faveur spéciale du ciel, je puis porter le ténor jusqu’à la note la plus élevée ; mais il nous manque un contre et une basse-taille. Cet officier du roi, qui hésitait à m’admettre dans sa compagnie, paraît avoir cette dernière voix, à en juger par les intonations qu’elle produit quand il parle.

— Prenez garde de juger témérairement et trop à la hâte, s’écria Alice en souriant : les apparences sont souvent trompeuses. Quoique le major Heyward puisse quelquefois produire les tons de la basse-taille, comme vous venez de les entendre, je puis vous assurer que le son naturel de sa voix approche beaucoup plus du ténor.