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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/127

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mandement de Dieu, John, et personne ne peut espérer de voir Dieu s’il n’obéit à ce commandement.

L’Indien écouta le ministre avec attention. Le feu qui brillait dans ses yeux se calma peu à peu, et ses muscles reprirent leur état de tranquillité ordinaire ; mais, secouant légèrement la tête, il fit signe à M. Grant de se remettre en marche, et il le suivit en silence. L’agitation qu’éprouvait M. Grant donna plus de rapidité à sa marche, et le vieux chef prit le même pas, sans paraître avoir besoin de faire le moindre effort ; mais Edwards s’aperçut que Louise au contraire ralentissait sa marche, et ils se trouvèrent bientôt à quelques pas de distance de leurs compagnons. Comme le sentier était alors plus large, il s’approcha d’elle et se mit à ses côtés.

— Vous êtes fatiguée, miss Grant, lui dit-il ; la neige cède sous les pieds, et rend la marche difficile. Acceptez le secours de mon bras. J’aperçois une lumière en face de nous ; c’est sans doute la maison de votre père, mais nous en sommes encore à quelque distance.

— Je suis en état de marcher, répondit-elle d’une voix faible et tremblante, mais ce vieil Indien m’a effrayée ; son regard était terrible quand il s’est retourné en parlant à mon père… J’oublie que c’est votre ami, peut-être votre parent, d’après ce qu’il vient de dire, et cependant vous ne m’inspirez pas la même crainte.

— Vous ne connaissez pas bien cette race d’hommes, miss Grant, lui répliqua son jeune conducteur, sans quoi vous sauriez que la vengeance passe pour une vertu parmi les Indiens. La première leçon que reçoit leur enfance, c’est de ne jamais oublier, de ne jamais pardonner une injure… Les droits de l’hospitalité peuvent seuls l’emporter sur leur ressentiment.

— J’espère, Monsieur, dit Louise en retirant son bras involontairement, que vous n’avez pas été élevé dans de tels sentiments ?

— Si votre digne père me faisait une pareille question, répondit-il, il me suffirait de lui dire que j’ai été élevé dans le sein de l’Église. Mais à vous, miss Grant, je vous répondrai que j’ai reçu plus d’une leçon pratique du pardon et de l’oubli des injures. Je crois que j’ai peu de reproches à me faire à cet égard ; et je tâcherai d’en avoir encore moins à l’avenir.

Tout en parlant ainsi, il lui offrit de nouveau son bras ; Louise