montagne jusqu’aux bords de la Susquehanna. Une assez grande quantité de terrain avait été défrichée des deux côtés, et ce fut le local qu’on choisit pour l’attaque générale, qui commença sur-le-champ.
Mêlé parmi les chasseurs, Natty Bumppo, son fusil appuyé sur son épaule, semblait se promener, uniquement pour jouer le rôle de spectateur. Ses chiens, qui le suivaient, allaient de temps en temps flairer un pigeon qui tombait, mort ou blessé, et revenaient se coucher aux pieds de leur maître, sans y toucher, comme s’ils eussent partagé ses sentiments, et qu’ils eussent jugé une telle chasse indigne d’eux comme de lui.
Les troupes de pigeons étaient si nombreuses qu’elles produisaient de temps en temps le même effet qu’un nuage qui intercepte les rayons du soleil. Une flèche lancée au hasard ne pouvait manquer de frapper une victime ; les décharges réitérées de mousqueterie en abattaient plusieurs à chaque coup ; enfin quelques individus, qui avaient gravi le sommet de la montagne, en tuèrent même avec de longs bâtons dont ils s’étaient munis à défaut d’autres armes.
Pendant ce temps, M. Jones, qui dédaignait les humbles moyens de destruction employés par les autres chasseurs, s’occupait avec Benjamin à préparer une attaque d’un genre plus formidable. Parmi les vestiges d’excursions militaires qu’on rencontre dans différents districts de la partie occidentale de l’État de New-York, on avait trouvé à peu de distance de Templeton, lors du premier établissement, un fauconneau du calibre d’une livre de balle, qui sans doute y avait été laissé par quelque détachement européen dans une incursion contre les Indiens, soit par oubli, soit parce que la nécessité d’une marche rapide ne permettait pas de le traîner. Ce canon en miniature avait été nettoyé de la rouille qui le rongeait, monté sur un nouvel affût, mis en état de service, et l’on s’en servait pour les cas de réjouissances extraordinaires. Le matin du 4 juillet[1], il faisait retentir treize fois les échos des montagnes de l’Otsego avec autant de dignité qu’une pièce de trente-deux, et le sergent ou capitaine Hollister, la première autorité du pays à cet égard, assurait que c’était un canon qui n’était nullement à mépriser pour un salut. Le service qu’il avait
- ↑ Pour le grand anniversaire national.