CHAPITRE XXX.
emarquable Pettibone, à qui la bonne place qu’elle occupait
dans la maison de M. Temple avait fait enfin oublier la blessure
que l’arrivée d’Élisabeth avait infligée à son orgueil, fut chargée
de reconduire miss Grant dans l’humble demeure que Richard
appelait le Presbytère, et elle ne tarda pas à la remettre entre les
bras de son père.
Pendant ce temps Marmaduke, resté tête à tête avec sa fille, se faisait répéter le détail des dangers qu’elle avait courus, et de la manière presque miraculeuse dont elle y avait échappé. Il se promenait dans l’appartement avec un air de mélancolie affectueuse, tandis qu’Élisabeth était couchée sur un canapé, l’œil humide et les joues encore enflammées.
— Il était temps que le ciel t’envoyât un libérateur, Bessy, dit Marmaduke ; il en était temps ! Et tu as eu le courage de ne pas abandonner ton amie !
— Je ne sais trop s’il faut appeler cela du courage, mon père, car je crois que je n’aurais pas eu la force de fuir. Et quand j’aurais fui, à quoi la fuite m’aurait-elle servi ? Mais je n’y ai pas pensé un instant.
— Et à quoi pensais-tu donc dans ce moment terrible ?
— À la panthère ! s’écria Élisabeth en se couvrant le visage des deux mains ; à la panthère ! je ne voyais qu’elle, je ne songeais qu’à elle. J’ai voulu un instant élever mes pensées vers le ciel, mais cet effort m’a été impossible : le danger était trop horrible, trop près de moi.
— Allons, allons, te voilà en sûreté, ne parlons plus de ce sujet désagréable. Je ne croyais pas que ces animaux féroces osassent venir si près de nos habitations ; mais quand ils sont pressés par la faim…