Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/33

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vince. Aux yeux d’un militaire, c’était une faute impardonnable. Il combattait pour leur défense et pour éloigner l’ennemi de leurs foyers, et eux, bien loin d’y concourir, ils le laissaient sans secours devant des forces supérieures. Il fut pourtant victorieux ; mais la victoire lui coûta cher, et il ne ramena au quartier-général qu’une poignée de braves qui avaient combattu sous ses ordres. Aussi ne pardonna-t-il jamais à ceux qui l’avaient exposé seul au danger : on avait beau lui dire que ce n’était nullement leur faute s’il avait été placé sur leurs frontières : c’était évidemment pour leur intérêt qu’il y avait été placé ; c’était donc leur devoir religieux, disait le major, c’était leur devoir religieux de marcher à son secours.

Jamais le vieux militaire ne fut un admirateur des paisibles disciples de Fox. Leur vie réglée et leur discipline sévère leur procuraient un air de santé et une stature athlétique ; le major ne voyait en eux qu’une vraie faiblesse morale ; il penchait aussi à croire que là où l’on donne tant aux formes extérieures de la religion, on ne saurait accorder beaucoup à la religion elle-même. Nous n’exprimons ici que l’opinion du major Effingham sur la religion chrétienne, et nous nous abstenons de la discuter.

Il n’est donc pas étonnant qu’Édouard, qui connaissait les sentiments de son père relativement à cette secte, ne se souciât pas qu’il apprît qu’il avait formé une société avec un quaker, et qu’il n’en avait exigé d’autre garantie que son intégrité.

Le père de Marmaduke descendait, avons-nous dit, d’un coreligionnaire et d’un compagnon de Penn ; mais ayant épousé une femme qui ne professait pas les mêmes doctrines religieuses, il n’était pas regardé comme un des zélés de cette secte. Son fils fut pourtant élevé dans les principes religieux suivis dans sa colonie ; mais ayant été envoyé pour son éducation à New-York, où l’on ne professait pas les mêmes opinions, et ayant ensuite épousé une femme d’une religion différente, les dogmes de sa secte avaient perdu beaucoup de leur influence sur son esprit ; cependant, en bien des occasions, on reconnaissait encore en lui le quaker, à ses manières et à ses discours.

Nous anticipons pourtant un peu sur les événements, car lorsque Marmaduke Temple entra en société avec Édouard Effingham, il était encore complètement quaker, du moins quant à l’extérieur, et c’eût été une épreuve trop dangereuse pour les