Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/371

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Tout est dit, s’écria Élisabeth ; plus d’espoir y nous n’avons plus qu’à mourir. Les flammes approchent lentement, mais elles approchent. Voyez, elles semblent consumer jusqu’à la terre.

Si les flammes s’étaient répandues sur ce rocher aussi rapidement qu’elles s’élançaient d’arbre en arbre sur les autres parties de la montagne, cette relation pénible aurait été moins longue, et nous aurions déjà eu à rapporter la fin tragique de deux victimes qui souffraient doublement par l’intérêt qu’elles s’inspiraient l’une à l’autre. Mais le génie du feu trouvait de ce côté des obstacles qu’il ne pouvait vaincre qu’avec le temps, et cette circonstance procura à Élisabeth et à son compagnon un répit qu’ils employèrent à faire les diverses tentatives que nous venons de rapporter.

La croûte mince de mauvaise terre qui couvrait la plate-forme ne produisait que quelques herbes qui ne tardaient pas à se flétrir et à se dessécher faute de sève. Une partie des pins, des chênes et des érables qui avaient crû dans les fentes du rocher étaient morts depuis des années, et la plupart des autres annonçaient, par leurs branches noires et arides et par le peu de feuilles dont ils étaient revêtus, qu’ils ne tarderaient pas à partager le même sort. Les flammes n’auraient pu trouver de meilleur aliment, si elles avaient pu y atteindre par une communication facile ; mais le terrain n’était pas couvert de ces branchés mortes, de ces feuilles sèches et de ces broussailles qui conduisaient l’élément destructeur avec la rapidité d’un torrent dans tout le reste de la forêt. Indépendamment de cette circonstance, une de ces sources fécondes dont le nombre est si considérable dans les montagnes de l’Otségo sortait du flanc de ce rocher, coulait en nappe sur la mousse qui le tapissait et formait un ruisseau qui, après en avoir fait le tour à peu de distance de sa base, allait se jeter dans le lac, non par des cascades successives, mais par des canaux souterrains, et en reparaissant à la surface de la terre de distance en distance. Pendant la saison des pluies, il formait presque un torrent et débordait sur ses rives ; mais pendant la sécheresse, on ne le reconnaissait que par l’humidité et les marécages qui annonçaient la proximité de l’eau. Lorsque le feu eut atteint cette barrière, il fut forcé de suspendre ses ravages, jusqu’à ce que la concentration de chaleur qu’il produisait pût en triompher.

Ce moment fatal semblait enfin arrivé. La chaleur avait tari le