Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/355

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nouvelle allusion qu’il faisait adroitement pour démontrer la nécessité d’exterminer Leurs ennemis était suivie de marques d’approbation de plus en plus bruyantes. Ne doutant plus du succès, le Teton en appela vivement à l’orgueil et au ressentiment de sa troupe ; puis, terminant tout à coup sa harangue, il s’assit à sa place.

Au milieu des murmures favorables qui suivirent un effort d’éloquence aussi remarquable, une voix basse, faible et creuse s’éleva graduellement dans l’air, comme si elle était tirée avec effort des cavités les plus profondes de la poitrine, et qu’elle prît de la force et de l’énergie en sortant. Le plus profond silence s’établit aussitôt, et les lèvres du vieillard s’entr’ouvrirent pour la première fois.

— Les jours du Balafré touchent à leur fin, furent les premiers mots qu’il prononça distinctement. Il est comme un buffle sur lequel le poil ne poussera plus. Il sera bientôt prêt à quitter sa tente pour aller en chercher une autre qui est éloignée des villages des Sioux. Ce qu’il va dire ne le concerne donc pas, mais bien ceux qu’il laissera après lui : ses paroles sont comme le fruit qui pend à l’arbre, mûres et dignes d’être données aux chefs.

— Bien des neiges sont tombées depuis que le Balafré n’a été vu sur le sentier de la guerre ; son sang a été bouillant, mais il a eu le bonheur de se calmer. Le Wahcondah ne lui envoie plus de rêves de guerre ; il voit qu’il vaut mieux vivre en paix.

— Mes frères, l’un de mes pieds est tourné vers le pays où chassent nos pères, l’autre suivra bientôt, et alors on verra un vieux chef chercher l’empreinte des mocassins de son père, afin qu’il ne se trompe pas, mais qu’il soit bien sûr d’arriver devant le maître de la vie par la même route qui a déjà été frayée par tant de bons Indiens. Mais qui me suivra ? le Balafré n’a pas d’enfants. Son aîné a fatigué trop de chevaux pawnies ; les os du plus jeune ont été rongés par des chiens Konzas ! Le Balafré vient ici pour chercher un jeune bras sur lequel il puisse s’appuyer ; il vient chercher un fils, afin que, lorsqu’il sera parti, sa tente ne reste point vide. Tachechana, la jeune Biche des Tetons, est trop faible pour soutenir un guerrier qui est vieux ; elle regarde devant elle et non derrière. Son esprit est dans la tente de son époux.

Le vétéran avait parlé d’un ton calme, mais ferme et décidé. Sa déclaration fut reçue en silence ; et, quoique plusieurs des partisans de Mahtoree tournassent les yeux sur leur chef, comme