Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/99

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

adresse. J’ai vu le jour où peu d’hommes savaient manier mieux que moi un long fusil tel que celui que je porte, et en tirer un meilleur parti. Vous avez raison, jeune homme, et il fut un temps ou il y avait du danger à remuer une feuille à la portée de mon oreille, ou, ajouta-t-il en baissant la voix et en prenant un air sérieux, à un Mingo rouge à sortir, ne fût-ce qu’un œil, de son embuscade. Vous avez entendu parler des Mingos rouges.

— Oui, des minks, dit Paul en prenant le vieillard par le bras, et en l’entraînant doucement du côté du bois, tandis qu’en même temps il jetait derrière lui des regards inquiets, pour s’assurer s’il n’était pas observé, de vos minks noirs communs, mais non pas d’une autre couleur.

— Bon Dieu ! s’écria le Trappeur en branlant la tête, et en ricanant à sa manière, il prend une brute pour un homme ! quoique, à vrai dire, un Mingo ne vaille guère mieux qu’une brute, si même il n’est pis encore, surtout quand il est alléché par l’odeur du rum et par l’occasion… Il y eut ce maudit Huron des lacs Supérieurs que je fis descendre du haut de son nid, au milieu des rochers derrière l’Hori…[1]

Sa voix se perdit dans le bois où, tout en parlant, il s’était laissé conduire par Paul, trop absorbé par des pensées qui se reportaient sur des scènes arrivées plus d’un demi siècle auparavant dans l’histoire du pays, pour opposer la moindre résistance.


CHAPITRE VIII.


Maintenant qu’ils sont à se chamailler je m’en vais regarder : ce perfide et abominable varlet, ce Diomède a pris avec lui ce jeune coquin, cet étourdi sans cervelle.
Shakspeare. Troïlus et Cressida. 



Pour éviter de donner à notre récit une étendue qui pourrait fatiguer le lecteur, nous le prions de se figurer qu’il s’est écoulé une semaine entre la scène qui termine le dernier chapitre et les événements pour la relation desquels nous nous proposons de

  1. Voyez le Dernier des Mohicans, chap. VIII.