Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 8, 1839.djvu/352

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seau, parut sentir ces avantages, et les cris partis du haut des mâts retentirent de vergues en vergues, et se firent entendre jusque dans le fond du navire.

Le Corsaire lui-même montrait plus de satisfaction que de coutume à l’idée de faire cette capture. Il sentait la nécessité de quelque exploit brillant ou profitable pour maintenir l’équipage dans l’obéissance, et une longue expérience lui avait appris qu’il ne pouvait jamais mieux resserrer les liens de la discipline que dans les momens qui paraissaient le plus exiger tout son courage et toute son habileté. En conséquence, il se montra au milieu des matelots, l’air ouvert et dégagé, parlant à plusieurs qu’il appelait par leurs noms, et dont il ne dédaignait même pas de demander l’avis sur la nature de la voile qui était en vue. Après leur avoir fait entendre indirectement que leurs dernières offenses étaient pardonnées, il convoqua Wilder, le général et un ou deux autres officiers supérieurs, et monta avec eux sur la poupe, où ils se disposèrent à faire des observations plus particulières et plus certaines, à l’aide d’une demi-douzaine d’excellentes lunettes.

Quelques minutes se passèrent à examiner en silence et avec attention l’objet qu’on avait en vue. Le jour était pur, le vent frais, sans être dur, la mer unie et l’horizon découvert de toutes parts. En un mot, tout se réunissait non-seulement pour faciliter leur examen, mais encore pour favoriser les manœuvres qui, suivant toute probabilité, allaient devenir nécessaires.

— C’est un vaisseau ! s’écria le Corsaire en baissant sa lunette, et annonçant ainsi le premier le résultat de son long et attentif examen.

— C’est un vaisseau ! répéta le général, sur les traits impassibles duquel un rayon de satisfaction semblait chercher à percer.

— Un vaisseau avec tous ses agrès, continua un troisième relevant la tête à son tour.

— Il faut qu’il y ait quelque chose pour soutenir tous ces espars, reprit le commandant. Il doit y avoir dessous une cargaison de prix. — Mais vous ne dites rien, monsieur Wilder ! C’est, suivant vous…

— Un vaisseau de haut bord, répondit notre aventurier, qui, bien qu’il eût gardé jusques alors le silence, n’avait pas fait ses observations avec le moins d’intérêt. Ma lunette me trompe-t-elle, ou…