Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 8, 1839.djvu/358

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dire. Je vois trois voiles neuves à son grand mât de perroquet, mais voilà tout.

— Le vaisseau est heureux d’avoir une si bonne voilure. — Et vous, monsieur Wilder, voyez-vous aussi les voiles plus lancées en question ?

— Il y a certainement quelque chose qu’on pourrait prendre pour de la toile plus neuve que le reste. Je crois que, comme le soleil se réfléchissait sur la voile, c’est ce que j’ai pris d’abord pour les signaux dont j’ai parlé.

— Alors on ne nous voit pas, et nous pouvons rester encore quelque temps tranquilles, tandis que nous avons l’avantage de pouvoir examiner ce vaisseau dans toutes ses parties, jusqu’aux voiles neuves qu’il porte à son perroquet.

Le Corsaire parlait d’un ton qui tenait le milieu entre le sarcasme et la réflexion. Alors il fit signe aux matelots, d’un air d’impatience, de se retirer. Lorsqu’ils furent seuls, il se tourna vers ses officiers qui gardaient un respectueux silence, et il reprit d’un air doux, grave, et en même temps affectueux :

— Messieurs, le temps du repos est passé, et la fortune nous offre enfin l’occasion d’exercer notre courage. Je ne saurais dire si le navire que nous avons en vue est juste de sept cent cinquante tonneaux, mais il est une chose que tout marin peut voir : à la carrure de ses vergues d’en haut, à la symétrie avec laquelle elles sont arrangées, et à la force de toile qu’elles présentent au vent, je déclare que c’est un vaisseau de guerre. Quelqu’un diffère-t-il de mon opinion ? Parlez, monsieur Wilder.

— Je sens la justesse de votre observation, et je pense comme vous.

L’espèce de défiance qui s’était répandue sur le front du Corsaire pendant la scène précédente se dissipa un peu lorsqu’il entendit l’aveu franc et direct de son lieutenant.

— Vous croyez que c’est un vaisseau de roi ? J’aime la franchise de cette réponse. Je vous ferai une autre question : l’attaquerons-nous ?

Il n’était pas aussi facile de donner une réponse décisive. Les officiers cherchaient à lire dans les yeux les uns des autres ce que pensaient leurs camarades, lorsqu’enfin leur chef crut devoir poser la question d’une manière plus directe.

— Eh bien ! général, reprit-il, vous qui êtes un homme sage, voici une question qui vous regarde : livrerons-nous la bataille